Comme chaque année, les touristes français sont nombreux à être venus. Quel effet cela vous fait-il : remise en question ou simples retrouvailles ?
Shraga Blum, Journaliste :
Au sortir de leur intimité hivernale, les villes d’Israël s’emplissent une nouvelle fois de leur flot de touristes bruyants et colorés. Les artères principales s’animent et la langue de Molière résonne plus que jamais. Il faut déjà remercier ces frères et sœurs d’avoir opté pour Israël au lieu d’aller bronzer sur les plages de la Costa Brava, ou pis encore… d’Hammamet en Tunisie ! Qui pourrait en vouloir à ces juifs de France de ne venir qu’en tant que touristes insouciants pendant deux ou trois semaines avant de repartir en laissant derrière eux les Israéliens continuer à se dépatouiller tout seuls, et en frimant devant leur copains : « C’était chouette-grave en IZraël » ??!! N’avons-nous pas été les uns et les autres dans leur situation il n’y a peut-être pas si longtemps ?? Non, aucune remise en question ne m’assaille lorsque je croise ces frères et sœurs avec lesquels j’ai tant envie d’entamer la conversation pour voir si on n’a pas un cousin en commun ! Au contraire, malgré le fait que nous vivons dans le pays qui a le plus grand nombre de problèmes au kilomètre carré, c’est pour eux que j’ai de la peine et que je m’inquiète. Ici, à Jérusalem comme à Tel-Aviv, leurs enfants peuvent porter fièrement la kippa dans la rue et chacun peut hurler : « David tu viens ??!!! » sans être insulté et frappé par des Sarrasins en quête de proies. Ils viennent ici pour respirer l’air de la liberté juive retrouvée et inspirer une bouffée d’oxygène avant de retourner dans la « grisaille de la France multicolore ». Quand je vois tous ces touristes français, ce ne sont peut-être pas des retrouvailles, mais ça les annonce certainement. Ce sont pour la plupart des Olim potentiels, qui pour l’instant nous font le plaisir de faire marcher l’industrie du tourisme et qui sait, posent peut-être les premiers jalons d’un retour définitif…
Shlomo Am Shalem, Ingénieur. Bénévole pour l’intégration des Olim de France à Haïfa :
Les touristes français ? Tout d’abord je les reconnais immédiatement. Mais je ne sais toujours pas mettre le doigt sur ce qui les rend si identifiables et à distance ! Serait-ce la calotte en soie ou de Yehi Adonenou, avec les tongs et le bronzage du dos nus, la marche débonnaire de toute la petite famille unie avec le T-shirt ou la casquette aux insignes de Tsahal ?… Et peut-être que c’est plus profond que cela… Et ce serait en fait ce regard Juif français que je parviens à captiver au passage, et qui rayonne un état d’âme, un presque-métabolisme, si diffèrent du nôtre : plus calme ? Plus détendu ? Plus naïf ?
Rencontrer un touriste Juif de France, c’est le défi renouvelé pour lequel je me pose la question : et chez moi, où est donc allée cette âme de Juif de France. L’ai-je perdue ? A-t-elle été complètement remplacée par ce Feu-De-Vie israélien, qui est le prix (prix-récompense et prix-coût…) de cette décision que j’ai prise d’être partie intégrante de la Guéoula, au lieu de me contenter d’en être un de ses « téléspectateurs » ? Mais c’est aussi sentir se réveiller en moi un amour du prochain pur et unique, l’amour du prochain Olé. Car ce frère d’âme perdue ou augmentée, je lui veux tant ce grand bien ! Ce bonheur de fouler enfin la Terre comme héritier, ce mérite de disputer notre droit de l’enlacer telle qu’elle est, rude et douce, miel et fallafel…
Jean-Charles Zerbib, Directeur FSJU-Israël, Président des Anciens EEIF en Israël :
Je suis toujours heureux de voir autant d’amis venir passer leurs vacances ici. Cela leur permet un vrai ressourcement et une bonne dose de soleil. Que ce soit la famille, les amis, les personnes avec lesquelles je travaille toute l’année…, il s’agit à chaque fois d’une rencontre renouvelée. Or, il ne peut y avoir de « vraie rencontre » sans « remise en question », de part et d’autre ! Le peuple juif est ainsi fait ! Nous avons toujours des choses à nous dire. Alors une fois épuisés les sujets de circonstance (la qualité des hôtels et du service, la crise économique, Hollande ou Sarkozy, les Jeux Olympiques, Obama ou pas, les derniers livres à la mode, etc.…), on abordera les sujets délicats voire conflictuels (l’après-Toulouse, le traitement du conflit par Bibi, l’Iran, le Judaïsme français, Hébron et les Territoires, l’Avenir du Peuple Juif…). Et après avoir chacun épuisé ses arguments, sans réussir à convaincre l’autre, nous pourrons tranquillement manger une bonne grillade en nous réjouissant de l’unité dans la diversité du peuple élu. Bonnes vacances !
Karel Kinsbrunner, Consultant Immobilier, Agence Laurent Boubli :
Personnellement, je suis toujours très heureuse de retrouver les touristes français et cela, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, parce qu’ils font montre d’une grande solidarité en venant passer leurs vacances ici et en soutenant de cette façon le tourisme dans le pays et l’économie israélienne.
Aussi, dans le cadre de mes fonctions professionnelles, j’éprouve beaucoup de plaisir à assister les Français dans leur recherche d’un investissement, un pied-à-terre ou bien un appartement dans la perspective d’une future alya. Chaque appartement acheté par un Français représente pour moi un pas en avant important dans le retour progressif des nôtres vers la Terre Sainte.
Enfin, je ressens un sentiment de facilité et de compréhension mutuelle dans les échanges, certainement du fait de communiquer dans la même langue maternelle et de partager une éducation et une culture communes
