Comment résumer huit jours d’opération ? D’abord en tant qu’Israéliens ? En tant que soldats ? Ou bien en tant que jeunes qui ont vécu une expérience différente de ceux de leur âge en Europe ? Voici le ressenti de soldats au lendemain de huit jours de combats dans la bande de Gaza et de centaines de roquettes sur Israël. 

  • Apprendre de ses commandants qu’une opération vient de commencer et comprendre que l’on va y prendre part.
  • Espérer que Tsahal restaure le calme en Israël, avant de comprendre que cette fois, Tsahal, c’est nous.
  • Annuler tous ses rendez-vous. Finalement, ne rien annuler du tout. La personne qu’on devait rencontrer oubliera sans doute l’existence même du rendez-vous, vu les circonstances.
  • Rentrer chez nous préparer un sac pour plusieurs jours, observer les civils et comprendre qu’ils s’attendent eux aussi à des jours difficiles.
  • Entendre la première sirène sonner à Tel Aviv, courir aux abris avec ses voisins et sentir que la ligne de front s’est déplacée jusqu’à notre chambre.
  • Cacher sa propre peur en se disant que l’uniforme que l’on porte exige de nous une maitrise de soi.
  • Constater, effrayé, que notre amie d’Ashkelon connaît les consignes de sécurité sur le bout des doigts.
  • Envoyer des dizaines de fois le même message à ses amis “tout va bien?”. En recevoir autant. Demander aux copains s’ils ont entendu l’explosion. Espérer que cette sirène effrayante ne retentisse plus jamais. Ouvrir une conversation groupée sur son téléphone intitulée “Roquettes et attaques terroristes : tout le monde va bien?”. Espérer ne jamais avoir à s’en servir. Ne même pas se dire que l’existence de cette conversation est surréaliste.
  • Avoir peur de se balader avec ses écouteurs, de dormir, de se doucher et de ne pas entendre la sirène. Préférer dormir sur le sol au milieu d’ordinateurs et de chaises dans une base militaire plutôt que de devoir s’endormir seul chez soi.
  • Lire la presse étrangère et ne pas se reconnaitre dans ce qui est écrit sur les actions de l’armée israélienne.
  • S’acheter un encas au café du coin. Constater que son serveur préféré n’est plus là. Comprendre qu’il a été rappelé par l’armée comme beaucoup d’autres. Apprendre que ses amis ont aussi été rappelés. Essayer d’avoir de leurs nouvelles. Ne pas avoir de réponse.
  • Dévisager les soldats aux cheveux blancs et dire que la guerre n’est plus de leur âge. Se regarder en uniforme dans le miroir et se dire qu’elle n’est pas vraiment du nôtre non plus.
  • Vouloir arriver un peu plus tard à notre tour de garde pour pouvoir nous reposer, mais ne pas le faire en pensant aux autres soldats qui attendent épuisés la relève
  • Retourner à l’armée à 1h du matin. Constater que les rues sont vides de jour comme de nuit.
  • Entendre une explosion, comprendre que c’était tout près. Courir vers le commandant pour en savoir plus. Avoir pour ordre de téléphoner à tout le reste de son unité pour vérifier que tout le monde est en vie.
  • Se rendre compte qu’une amie est en route pour l’armée, bloquée à quelques mètres de l’explosion, au moment où la police nous ordonne ne pas sortir de crainte qu’un terroriste soit en liberté.
  • Annoncer le cessez le feu. Rentrer chez soi, se doucher et aller dormir. Mettre un réveil pour profiter de la journée. Mettre ses écouteurs à plein volume sans avoir peur. Donner rendez-vous à ses amis à la terrasse d’un café : ceux qui reviennent de la frontière de Gaza, ceux qui ont passé la semaine cloîtrés dans un abri, ceux qui ont passé la semaine à l’armée.
  • Donner de la valeur à chaque rayon de soleil, chaque minute passée au calme, justement à ne parler de rien.
  • Vouloir prendre le premier avion pour Paris, New-York ou Berlin histoire de s’aérer un peu. Rester finalement en Israël parce qu’on n’a pas envie d’être ailleurs.
  • Sentir que quelque chose a changé en nous. A-t-on grandi ? A-t-on perdu notre innocence ? Savons-nous à présent relativiser les petits problèmes du quotidien ? Sommes-nous devenus un peu plus israéliens ?
  • Surement un peu tout ça à la fois.

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