Le patron de Numericable-SFR en France se rêve en consolidateur du câble américain. Il a annoncé ce matin le rachat du câblo-opérateur Cablevision pour près de 18 milliards de dollars.

C’est l’un des plus gros chèques que Patrick Drahi a eu à faire dans sa carrière : 17,7 milliards de dollars (15,7 milliards d’euros, contre 17,4 milliards pour le rachat de SFR). Avec cette somme, le patron d’Altice, la maison mère de Numericable-SFR, rachète à la famille Dolan le quatrième câblo-opérateur américain Cablevision (dette comprise), très présent à New York. Le pays de l’Oncle Sam, Patrick Drahi le connaît bien : il s’est déjà offert au printemps 70 % du « câblo » Suddenlink . Il avait alors prévenu qu’il ne s’arrêterait pas là : « Si je prends cinq petits câblo-opérateurs de la taille de Numericable aux Etats-Unis, je deviens aussi gros que Time Warner Cable », avait-il déclaré à quelques journalistes, en marge d’une audition à l’Assemblée nationale.

L’opération est financée par 14,5 milliards de dollars de dette nouvelle et existante de Cablevision, du cash du câblo-opérateur et 3,3 milliards de dollars d’Altice, qui va émettre des actions de classe A, lesquelles possèdent moins de droits de vote que les B, concentrées entre les mains de Patrick Drahi. Une fois l’intégration des actifs réalisée, Altice , désormais numéro quatre des « câblo » aux Etats-Unis, pourrait introduire en Bourse ses actifs américains. « L’objectif, à terme, c’est d’équilibrer le portefeuille à 50-50 entre les Etats-Unis et l’Europe », affirme-t-on chez Altice, qui réalisera après ces rachats, 30 % de ses revenus Outre-Atlantique. Le groupe s’étend aujourd’hui en Belgique, au Luxembourg, en Suisse, au Portugal, en passant par l’Asie, Israël et la République Dominicaine.

Cablevision, c’est aussi la première acquisition média de Patrick Drahi aux Etats-Unis. Le câblo-opérateur possède en effet la première chaîne de télévision régionale d’informations (News 12), un quotidien (« News Day ») et un quotidien gratuit (« AM New York »). L’homme d’affaires parie sur la convergence entre médias et télécoms. En France, il vient de sceller un partenariat avec NextRadioTV (BFM TV, RMC…) en vue de racheter le groupe en 2019.

Des « câblo » en pleine ébullition

Si aujourd’hui, l’homme d’affaires franco-israélien lorgne du côté des Etats-Unis, c’est parce qu’il y flaire des opportunités. Le business du câble y est, depuis quelques mois, en pleine ébullition. Voyant les gros opérateurs américains fusionner entre eux, il s’est mis en tête de racheter les entreprises restantes.

Il est plutôt bien positionné : le troisième câblo-opérateur américain Charter Communications est en train de racheter le numéro deux du secteur Time Warner Cable pour près de 79 milliards de dollars. Les deux groupes vont être mobilisés pour plusieurs mois par cette énorme opération. Il ne vont donc pas procéder à d’autres transactions. Déjà numéro un du câble aux Etats-Unis, Comcast est de son côté limité dans ses emplettes par l’autorité de la concurrence.

Patrick Drahi a ainsi très vite compris qu’il avait un boulevard devant lui. « La capacité de rentabilité des actifs est intéressante. Moi j’arrive de la France, un pays où règne l’hypercompétitivité. Alors qu’aux Etats-Unis, il y a beaucoup moins de concurrence. Les opérateurs se partagent des marges de folie ici et je pense qu’on peut amener une capacité à gérer autrement », assurait-il fin mai. Dexter Goei, le DG d’Altice, vise une marge « dans le bas des 40 % », contre 28 % actuellement, pour Cablevision.

Il reste quelques gros poissons sur lesquels il pourrait jeter son dévolu. Il aurait notamment dans son viseur le câble de l’opérateur Verizon, évalué à environ 34 milliards de dollars par Citigroup. Patrick Drahi se verrait par ailleurs bien racheter Cox Communications ou Mediacom. Il aurait aussi été contacté par T-Mobile US, filiale américaine de Deutsche Telekom, qu’avait échoué à racheter Xavier Niel il y a un an. Mais il n’aurait pas donné suite.

Patrick Drahi avait même envisagé, un temps, de racheter Time Warner Cable, ce qui aurait représenté une acquisition gigantesque. Mais il n’avait pas déposé d’offre, s’estimant alors « pas prêt » à faire le deal. « J’ai discuté deux heures avec le patron. Il était comme un fou, il devait prendre une décision dans l’heure. Je lui ai dit : on ne va pas prendre une décision comme cela, on se calme », avait-il raconté fin mai. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne le fera pas un jour.

www.lesechos.fr

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