Après des années de manque de représentation politique pour les immigrants français, un nouvel organisme appelé «Aleinu» est déterminé à changer la réalité. Rencontrez les candidats que l’organisation promeut avant les prochaines élections municipales.

Les juifs occidentaux n’ont jamais été aussi nombreux que ces dernières années en Israël. Néanmoins, les immigrés français ne sont pas représentés à la Knesset ni dans les autorités locales. Cette situation change suite à l’ article que nous avons publié il y a un mois dans le journal Makor Rishon sur la nouvelle organisation «Aleinu», qui présente des candidats francophones pour les élections locales en octobre. Il semblerait qu’il y ait un flot de demandes des partis politiques et des médias précise Yomtob Kalfon, fondateur de l’organisation avec Arie Abitbol. Il ajoute, que « tous les médias de la communauté française en Israël et de la communauté juive en France ont relaté cette initiative après la publication de l’article.  « Il y a eu une véritable discussion dans les médias sociaux entourant la publication, des échanges animés sur la nécessité d’une telle initiative, tout le monde en a parlé, c’était le discours du jour. »

Ces discussions sont destinées à mûrir en coopération. «Nous avons été approchés par plusieurs listes existantes dans les villes avec lesquelles nous traitons, et nos représentants ont reçu des places réalistes. Nous n’avons pas encore signé de contrat avec ces partis, mais les contacts sont très sérieux», explique Kalfon. Et cela ne s’arrête pas au niveau local. « Un membre de la Knesset s’est approché de nous et a demandé à être en contact, et quelques autres représentants politiques ont commencé à le ressentir.

Photo: Avishag Shear-Yeshuv
La situation est sur le point de changer. Kalfon et les candidats français pour les élections au niveau local. Photo: Avishag Shear-Yeshuv

Raanana : Synagogues manquantes

Pendant ce temps, dans d’autres villes, un groupe de francophones a déjà sélectionné un candidat pour l’organisation  »Aleinu ».
À Raanana, il s’agit du Dr Michael Wolf, 41 ans, pédiatre, marié et père de trois enfants, qui a immigré en Israël en 2006 en provenance de Belgique.
Sa femme est originaire de Paris, donc il parle français avec un accent belge et fait partie de la communauté. « Un mois après notre mariage, nous étions déjà en Israël, et il était clair pour nous que c’était ce que nous devions faire », dit-il. « Mes enfants sont nés ici et ce sont des sabras. »

Pourquoi entrez-vous en politique maintenant ?
« Parce que cela m’a toujours intéressé, non seulement à Raanana, mais au niveau national. En fait, tout commence avec la municipalité du lieu ou l’on vit, donc je veux influencer à ce niveau.
Si vous voulez que des choses importantes changent dans la vie des gens, la Knesset c’est important, mais vous devez d’abord travailler sur le terrain, au niveau local.  »

 

Photo: Avishag Shear-Yeshuv
Il était toujours intéressé par la politique. Dr. Michael Wolf Photo: Avishag Shear-Yeshuv

Quelques jours après avoir décidé de se présenter de manière indépendante, Yomtob Klafon s’est rapproché de lui de façon presque incidente. Depuis Michael Wolf fait partie de l’organisation. «Il est préférable de se présenter à des élections lorsque vous avez un réseau qui vous soutient», explique-t-il.

« Je ne peux rien dire de mal de la municipalité « , dit-il, « mais Raanana est une ville d’immigrants, non seulement de France, mais aussi d’Amérique du Nord, d’Amérique du Sud et d’Afrique du Sud. J’ai parlé avec des immigrants d’Amérique du Sud et de Belgique, et j’en conclu qu’ils ont tous les mêmes problèmes et difficultés, mais je ne connais pas d’immigrants membres au conseil municipal. Nous avons l’intention de travailler ensemble, pour les immigrants de tous les pays.

Raanana a pour résidents depuis de nombreuses années des anglophones originaires de divers pays, mais Wolf n’est pas en contact avec eux. « Je n’ai aucun lien avec cette population, mais je pense que leurs difficultés est différente de la nôtre, et j’espère que je réussirai non seulement à améliorer la vie quotidienne des olim, mais aussi de la population en général. Je pense presenter une liste indépendante pour un parti d’immigration ,  car à Raanana nous sommes assez forts pour faire face seuls, si tous les électeurs français, espagnols et portugais votent ensemble – nous serons assez forts pour réussir.  »

Quelle est la première chose que vous voulez améliorer?

«Education, absorption, amélioration des services sociaux, et ce qui est particulièrement important pour les olim de France : la construction de plus de synagogues, il y a beaucoup de Juifs religieux et traditionalistes parmi les français, et ils trouvent difficilement des lieux de prière.

Bat-Yam: Tout le monde se sent immigrant

Un autre candidat associé à  »Aleinu » est Benjamin Fellous (30 ans) de Bat Yam, qui a immigré de France il y a 12 ans.  Il est professeur d’histoire à l’école secondaire de Tel Aviv où étudient les enfants d’olim. B Fellous a servi dans l’armée israélienne et au ministère de la Défense pendant plusieurs années. Il dirige une entreprise internationale de commerce en électronique.
Il a rencontré sa femme quand il est retourné étudier en France. « Je ne reste pas en France », lui a t elle dit, et elle l’a suivi en Israël. Ils sont les heureux parents d’une petite fille née récemment.

Photo: Avishag Shear-Yeshuv
Benjamin Fellous. Photo: Avishag Shear-Yeshuv

Pourquoi la politique?

« J’ai rejoint  »Aleinu » parce que je veux aider les autorités locales à accueillir les nouveaux immigrants. Cela aidera les autorités locales avant même d’aider les immigrants. Nous sommes installés à Bat Yam depuis deux ans, et ma femme et moi sommes très attachés à cette ville.
En tant que professeur d’histoire, je sais que le maire qui a le plus contribué au développement de Bat Yam était un nouvel immigrant de France nommé Menachem Rothschild. Il a immigré en Israël depuis Strasbourg, a combattu pendant la Guerre d’Indépendance, et il a été maire pendant plusieurs mandats entre les années soixante à quatre-vingt.

«À Bat Yam, tout le monde se sent nouvel immigrant, même s’ils y ont grandi.  Certains sont originaires des pays du Maghreb de la deuxième génération ou d’autres endroits et ils se sentent encore nouveaux ici, n’ayant aucune confiance dans leur pays ou leur ville. Les malversations au sein de la mairie ne les confortent pas non plus. Ils se sentent étrangers à l’intérieur de l’Etat d’Israël.  »

Et comment Benjamin Fellous veut-il changer cela ?
« Tout d’abord, tous les comptes municipaux doivent être transparents. Lorsque vous payez vos impôts fonciers, vous voulez savoir où ça va, comme cela se pratique dans tous les pays démocratiques »
Benjamin Fellous  sera en concurrence dans une liste d’immigrants qui comprendra les immigrants de Russie, d’Afrique du Nord et de Géorgie. « Nous voulons donner une chance à Bat Yam », conclut-il.

Givat Shmuel : Merci à l’université Bar Ilan

Moriah Rodrig (Hadad) de Guivat Shmuel a été célèbre il y a quelques années. Elle a été la vedette de la couverture du prestigieux magazine Newsweek en tant que symbole de l’immigration juive en provenance d’Europe.
Moriah Rodrig (30 ans), a immigré de Belgique en Israël à l’âge de 18 ans, elle a été photographiée tenant sa valise, avec le titre : « Exodus – Pourquoi les Juifs européens fuient-ils à nouveau ?  »

« L’article a été publié en 2014, à l’apogée de l’immigration de l’Europe vers Israël », se souvient-elle. « A l’époque, l’attaque du Musée juif de Bruxelles a eu lieu, et ils voulaient faire un petit article sur l’immigration des Belges en Israël, et en quelque sorte c’est devenu une histoire de couverture sur les Juifs quittant toute l’Europe. »

Photo: Avishag Shear-Yeshuv
Devenue un symbole de l’immigration juive d’Europe. Moriah Rodrig. Photo: Avishag Shear-Yeshuv

Moriah Rodrig a grandi à Anvers et sa famille y vit toujours. Aujourd’hui, elle est avocate indépendante en immobilier et consultante fiscale internationale, mère de deux enfants et mariée à un sabra israélien: «J’ai vécu à Guivat Shmuel depuis que j’ai immigré. J’ai étudié le droit à l’Université Bar- Ilan, et il y a une grande communauté de jeunes immigrants, pour la plupart religieux, qui sont venus spécialement pour étudier dans cette université et y sont restés. J’ai vécu dans un appartement avec des filles françaises, et beaucoup d’entre nous sommes restés en Israël et nous nous sommes mariés, et maintenant les enfants sont à la maternelle ensemble.  »

À Guivat Shmuel, dit-elle, il y a de nombreux immigrants qui parlent anglais, français et récemment espagnol. « Mais la grande messe est la nôtre, quand vous vous promenez dans le centre commercial, vous entendez beaucoup de français. » En plus de son activité principale, Moriah est présidente de l’Association des immigrés belges en Israël: « J’aide les immigrés en Israël et gère les relations belgo-israéliennes ».

A présent, c’est Yomtob Kalfon qui se tourne vers Moriah qui n’a jamais pensé à la politique. « Je connais Yomtob de Bar-Ilan », dit-elle. « Il est venu vers moi et m’a demandé si j’étais intéressée à participer aux élections municipales à Guivat Shmouel, et j’ai rejoint l’équipe, intéressée notamment par la question de l’intégration des immigrés, car il est très difficile de changer les choses au niveau national.

Photo: Avishag Shear-Yeshuv
Il persuade Moriah Rodrig d’entrer en politique. Yomtob Kalfon. Photo: Avishag Shear-Yeshuv

Moriah Rodrigue ne sait pas encore comment elle va faire face à ce défit à Guivat Shmuel – rejoindre une liste existante ou créer une liste indépendante.
« Je n’ai pas d’expérience en politique, mais j’ai des recettes dans ce domaine. Nous avons fait une cartographie politique de Guivat Shmouel, et je connais tous les partis et leurs représentants au conseil municipal. L’arène politique à Guivat Shmuel est généralement divisée entre religieux et laïques. La plupart des immigrants sont religieux et chaque immigration a ses propres synagogues.
Les Français ont plusieurs synagogues, tout comme les Américains.  Je suis ici depuis plus de 13 ans, j’ai terminé mon intégration, et aujourd’hui je veux aider les immigrants qui ont besoin de cette aide. »

Elle déclare son intention «d’aider les olim dans leur vie quotidienne.  »Je ne vais pas faire une révolution française, mais plutôt, pour instiller beaucoup de choses que j’ai appris. J ai des idées, elles fonctionnent actuellement dans de nombreuses villes du monde pourquoi pas ici, sur des sujets comme la culture, la société et l’éducation. Des choses positives qui peuvent être combinées ici en Israël.  »

Pourquoi voudraient-ils vous choisir ?
«J’ai de l’expérience pour aider les nouveaux immigrants, et je ne suis pas un nouvel immigrant qui vient de descendre de l’avion. Je connais bien la bureaucratie israélienne et j’ai aussi des connaissances et une expérience juridiques, je parle cinq langues et j’apprends même l’espagnol dit elle en souriant. «Je suis ici pour donner,  j’ai de la famille, du travail et de nombreuses activités mais je veux faire la différence. »

Netanya: Nous ne serons pas Français

La capitale française incontestée d’Israël est Netanya. Selon les estimations, les francophones de la ville représentent environ 10% de la population. Cependant, même dans la ville côtière touristiques, les Français n’ont presque aucune représentation dans la municipalité. La personne qui espère changer la situation au nom d’Aleinu est Raphael Amzalag, 33 ans, un stratège, marié et père de deux enfants qui a  immigré en 2002 d’une banlieue parisienne.

Lors des précédentes élections municipales, Amzaleg a été placé en 11 ème position sur la liste du maire de Netanya, Myriam Feirberg et a presque rejoint le conseil municipal. Maintenant, il espère être élu. « Nous avons rencontré Feierberg il y a quelques semaines, mais il n’a pas encore été décidé si je vais me joindre a elle ou sur une autre liste », dit-il.

Miriam Feirberg devant le tribunal. Photo: Gideon Markovitz
Amazlag n’a pas décidé de courir avec elle ou une autre liste. Miriam Feirberg. Photo: Gideon Markovitz

Amzalag est très actif dans la ville et, en tant que membre de l’Association touristique de Netanya, il est fier des nombreux avantages qu’il a obtenus pour les immigrants. « Nous devons faire en sorte de rendre autonomes les immigrés et leur apporter une solution à leurs besoins, pour les placer au centre du discours urbain. » Netanya a toujours été une ville d’immigrants,
Mais la question n’est pas au centre de l’agenda municipal et c’est dommage. Bien qu’à mon avis des choses très positives aient été faites durant le dernier mandat du conseil municipal », ajoute-t-il. L’immigration en provenance de l’Union Soviétique, qui représente environ un quart de la population de la ville, compte plusieurs membres au conseil municipal, alors que les immigrants de France ne comptent qu’un seul membre.

Comment l’expliquez-vous ?
« Chaque liste s’est parée d’un candidat français a une place irréaliste. J’étais moi-même l’un de ceux-là lors des élections précédentes, mais j’étais jeune et inconnu, donc j’ai accepté l’offre. Dans chaque liste sont placés des hommes français ou belges, mais ils ne peuvent pas faire grand chose.  »

Est-ce que cela va changer ?
« Oui, la tendance est de faire comprendre à tous que les immigrés de France sont une force politique qui va devenir importante dans les années à venir, et déjà lors des prochaines élections locales. Le but ultime est d’avoir des élus issus de l’alya francophone. Nous voulons que notre voix soit entendue dans les réunions du conseil, et nous n’excluons pas la coopération avec d’autres listes.  »

Pourquoi pensez-vous que les Français n’ont pas encore réussi à entrer en politique ?
« Les Français sont venus avec une large culture du monde des associations à but non lucratif, et ils ont essayé d’agir dans ce domaine. Mais les organisations à but non lucratif sont un pipeline pour le transfert de fonds publics, et pour que vous puissiez en profiter, vous devez vous asseoir près du robinet. Je parle bien sûr d’activités totalement légales.
Nous en avons manqué l’occasion, et malheureusement ça ne c’est pas représenté.  »

Il estime qu’il y a une très grande chance d’introduire des candidats dans plusieurs villes,  « mais cela ne peut arriver qu’aux prochaines élections, parce que les choses ne se construisent pas en une campagne électorale. D’un autre côté, si nous pouvons faire entrer certains de nos candidats lors de ces élections cela nous suffira.  »

En direction de la Knesset

Benjamin Lashkar (41 ans) est un militant du Likoud actif et connu dans la communauté française en Israël. Il commente fréquemment les affaires courantes sur les réseaux sociaux et des médias de droite.  Il a immigré en Israël il y a vingt ans, et identifie une différence entre les périodes : « Les immigrants de cette époque sont devenus des Israéliens, ils ne sont pas restés français.  »

Benjamin Lashkar a étudié à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris avant de faire son Alya en 1996. En Israël, il a continué ses études, fait son service militaire, puis travaillé dans des sociétés internet. Il s’est impliqué dans le militantisme et la politique depuis le milieu des années 90, commençant comme un des leaders de l’Union des Etudiants Juifs de France. En 2008 il a été candidat aux élections municipales de Jérusalem de 2008 sur la liste de Nir Barkat. Il a été par la suite son conseiller pour les affaires d’intégration. De 2010 à 2013, il a été en charge du marketing vers la France, la Hollande et les pays scandinaves au ministère du tourisme israélien. De 2013 à 2015, il a été envoyé en France comme représentant du Keren Hayesod – Appel Unifié pour Israël dans le sud de la France.  A présent, il travaille comme consultant externe auprès d’un organisme gouvernemental et il est porte-parole des francophones au Likoud.  Il a fréquenté le monde politique de nombreuses années, mais n’a pas encore été élu à la municipalité de Jérusalem ou à la Knesset. «Les immigrants d’aujourd’hui sont complètement perdus», dit-il. « Ils sont en effet très sionistes, mais ils ne montent pas en Israël par idéologique comme autrefois. Parmi les olim, il y a beaucoup de familles et de retraités avec les problèmes des barrières de la langue, de l’emploi ….et de la bureaucratie. Il y a aussi un gros problème de mentalité et d’incompréhension du système israélien. »

Photo: AFP
« Si vous n’avez pas un représentant au niveau local ou national, vous n’existez pas en Israël. » Immigrants de France. Photo: AFP

Au cours des deux dernières années, Lashkar a essayé de persuader les immigrants français en Israël que la voie d’une bonne absorption passe par l’arène politique. « Si vous n’avez pas un représentant au niveau local ou national, vous n’existez pas en Israël », dit-il. Il a fait partie d’une organisation dirigée par le Dr. Dov Maimon, un sociologue immigré de France et l’une des voix les plus importantes de la communauté israélienne. Des tentatives ont été faites par la communauté française mais elles n’ont pas décollé en raison des problèmes habituels des français, le moi » reconnait Lashkar. L’objectif était similaire à celui d »’Aleinu » : placer des candidats francophones sur des listes existantes ou indépendantes dans le système politique israélien et dans tous les partis.

Lashkar a commencé sa propre course en indépendant, mais ces jours-ci, il est en pourparler avec les gens d »’Aleinu, afin d’explorer une possibilité de coopération. Il entretient des liens avec plusieurs immigrants éminents, dont Haim Messika, porte parole de Koulanou en français, qui gère également une page Facebook en français pour le président du parti, Moshe Kahlon, et Olivier Rafowicz, conseiller externe du ministre de l’Immigration et de l’Absorption, Sofa Landver, et membre du parti Yisrael Beiteinu.

« J’ai lancé une campagne dans les médias français », explique Lashkar. « Je suis connu en tant que politicien, et j’ai une chance de courir pour le Likoud à Jérusalem. J’ai un grand soutien et une entreprise de médias m’aide à promouvoir mes messages auprès de la communauté française. Je suis membre du Likoud et je veux aller de l’avant dans ce parti. Je parle de la Knesset,
Mais d’abord je souhaite  travailler davantage au plan de la politique locale parce qu’elle est la plus proche du terrain  et ainsi aider les olim dans leur vie quotidienne. »

Traduction et adaptation Ashdodcafe.com
Source : www.makorrishon.co.il

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