Accueil L'Actu Economique-Juridique-Fiscal L’influence grandissante des Olim français en droit de la famille israélien

L’influence grandissante des Olim français en droit de la famille israélien

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L’alya de France propage ses effets même dans les décisions des Tribunaux des affaires familiales en Israël.

Le 10 octobre 2016, un verdict a été rendu au Tribunal des affaires familiales de Tel Aviv. Dans cette affaire, un couple de nouveaux immigrants de France, arrivés en 2012, avait conclu en 2010, avant leur mariage en France un contrat établissant la séparation de biens, à l’exception de ce qui est considéré comme biens communs. Il y a environ six mois, le Tribunal rabbinique a prononcé leur divorce.

I/Les faits de l’affaire :

La femme avait déposé une demande de pension alimentaire, ainsi qu’une demande de partage des biens qui, selon elle, ne déroge pas à l’accord prénuptial. Le mari de son côté, avait déposé une demande de restitution de fonds que son épouse a, selon lui, tirés indûment de leur compte commun, ainsi qu’une attestation qu’il est seul propriétaire de la demeure, inscrite à parts égales au nom des deux époux, mais acquise par lui seul pour un montant de 8, 500, 000 shekels.

L’épouse a prétendu qu’elle a fait la connaissance du mari quand elle était étudiante, que depuis leur mariage, elle ne travaille pas et qu’elle n’a aucun revenu propre, du fait, entre autres, qu’en trois ans il leur est né trois enfants. Selon elle, son mari était très riche, il possédait plusieurs biens, des Sociétés et des affaires dans le monde entier. Elle a donc demandé une pension alimentaire d’un montant de 45 000 shekels par mois, ainsi qu’une demande d’un versement unique de réhabilitation.

De son côté, le mari prétendait toucher 10 000 shekels par mois, plus 4 000 euros pour son travail dans une entreprise étrangère. Le mari reconnaissait posséder une Société à plusieurs millions de shekels, divers comptes bancaires, des appartements à Paris, des biens immobiliers à Netanya, à Tel Aviv, etc… Mais il prétendait que cela ne devait pas être pris en compte pour le calcul du montant des pensions alimentaires qu’il devait payer à sa femme et ses enfants. Il demandait donc que la pension ne s’élève qu’à 6 000 shekels par mois, en plus d’une rente de logement mensuelle de 8 000 shekels tout au plus.

Le Tribunal a eu à faire la liste des divers biens du mari, dont la valeur se montait à des dizaines de millions de shekels, eta relevé que « le mari n’a pas produit une déclaration honnête et véritable de ses revenus », évaluant ceux-ci à environ un million de shekels par mois, soit 140 fois plus que la capacité de rémunération de la femme.

Finalement, le juge a décidé que le défendeur aurait à payer aux enfants une pension alimentaire de 30 000 shekels par mois :10 000 pour chaque enfant, et assumer 80% de leurs frais médicaux. Le juge a noté, entre autres, qu’il n’y avait pas lieu de fixer « des montants minimum » pour la famille qui, avant les dissensions, menait un train de vie élevé.

De plus, le défendeur a été condamné à payer à la demanderesse une pension alimentaire d’épouse d’un montant de 10 000 shekels pendant 13 mois (depuis la date de dépôt de la plainte et jusqu’au moment du divorce). Le Tribunal a rejeté la demande de la femme pour un versement de réhabilitation, étant donné sa part de l’appartement et du compte bancaire commun.

II/ La particularité de l’affaire :

Les parties n’étaient pas d’accord en ce qui concernait leur demeure, qui a été acquise par le financement exclusif du mari pour un montant d’environ 8,5 millions de shekels.

Leur accord financier ayant été signé en France, celui-ci se retrouvait soumis aux lois françaises.Ainsi, le mari affirmait que, selon la loi française, la détermination de la propriété du bien était fonction de la provenance des fonds, c’est-à-dire que le bien devrait appartenir à la personne qui en a financé l’achat. L’épouse quant à elle prétendait que, même selon les lois françaises, les parties peuvent en décider autrement, comme cela a été dans leur cas, où l’appartement a été enregistré à leurs deux noms, c’est-à-dire qu’ils étaient d’accord pour dire qu’il s’agissait d’un bien commun.

Le juge a analysé l’avis d’un expert commandé par les parties au sujet des lois françaises et a finalement décidé, après avoir établi que, malgré l’existence d’un accord financier, les parties peuvent se faire mutuellement des cadeaux, et qu’ainsi, le mari a offert à sa femme la moitié de l’appartement.

Ici, le juge israélien a eu à interpréter un article du code civil français. L’article 1538 dispose que les présomptions de propriétés établies au contrat de mariage ne seront opposables aux tiers ou à l’autre époux que s’il n’en a pas été autrement convenu au cours de l’union. Le tribunal israélien a donc investi beaucoup d’efforts afin de donner une issue au litige qui soit en accord avec la loi française, et c’est en cela qu‘il s’agit d’une démarche remarquable.

La solution donnée a donc été de dire que, malgré l’existence d’un contrat de mariage, le mari a convenu d’inscrire le bien acheté avec ses fonds personnels au nom de sa femme, pour les juges israéliens il s’agit cadeau fait à son épouse, l’appartement est ainsi entré dans la communauté de biens des époux. La demanderesse aura donc effectivement droit à la moitié de l’appartement du couple, bien que celui-ci n’ait été financé que par l’époux seul, et en dépit de l’existence d’un contrat de mariage.

Cet article ne peut être assimilé à une consultation et ne doit être entendu que comme une source d’information générale.

Pour plus de renseignements, contactez Maitre Liane Kehat

Liane Kehat Cabinet Juridique et Notariat

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