US President Donald Trump (L) and Israel's Prime Minister Benjamin Netanyahu shake hands after delivering a speech at the Israel Museum in Jerusalem on May 23, 2017. / AFP PHOTO / MANDEL NGAN *** Local Caption *** 24.05.17 26.05.17 ô

Le Premier ministre Netaniahou s’est envolé cette nuit pour les États-Unis où le président Trump l’attend dans sa demeure de Miami.

Analyse.
Sommet de Mar-a-Lago : les objectifs de l’establishment de la Défense et les concessions que Netanyahu devra faire.
Netanyahu rencontrera Trump cette semaine et tentera de parvenir à des accords. Cependant, les services de défense mettent en garde : les cessez-le-feu, sur tous les fronts, sont au bord de l’épuisement. Le Hamas et le Hezbollah refusent de désarmer, et dans ces conditions, Tsahal ne se retirera pas de la Ligne jaune à Gaza ni des avant-postes qu’elle a conquis au Sud-Liban. Mais la principale préoccupation est que les États-Unis concluent un « mauvais accord » avec l’Iran et que Netanyahu soit contraint de sacrifier des intérêts sécuritaires vitaux.

Les services de sécurité reconnaissent que les accords de cessez-le-feu actuels arrivent à leur terme . À Gaza, les envoyés et médiateurs du président américain font pression sur Israël pour qu’il passe à la deuxième phase du « plan en 20 points », qui prévoit un retrait israélien et le désarmement du Hamas. Au Liban, l’ultimatum lancé par le président américain Donald Trump au Hezbollah pour qu’il désarme expire mercredi prochain, et les négociations israélo-syriennes sont également dans l’impasse. Par conséquent, sur le terrain, dans les faits, la situation est très peu avancée.

Le Hamas et le Hezbollah refusent de désarmer, et les Américains nourrissent des projets ambitieux, mais peinent à mettre en place les mécanismes nécessaires à leur application. Par conséquent, la pression de Washington sur Israël pour obtenir des concessions – principalement de nouveaux retraits, sans désarmement du Hamas et du Hezbollah – qui permettraient à Trump de démontrer un changement de cap sur tous les fronts et, peut-être, de se rapprocher du prix Nobel s’accentue.

Au siège du gouvernement, en revanche, on craint que si nous accédons à ces exigences, les acquis de la guerre du 7 octobre ne soient anéantis et que nous ne perdions l’occasion d’améliorer sensiblement notre situation en matière de sécurité nationale.
Par conséquent, le voyage de Netanyahou aux États-Unis pour rencontrer Trump à ce moment précis est tout aussi crucial, car ce qui sera convenu, le cas échéant, à Mar-a-Lago entre Trump et ses conseillers et Netanyahou, permettra une meilleure harmonisation des aspirations et des souhaits de la Maison-Blanche avec les intérêts sécuritaires d’Israël, et déterminera les modalités d’application sur le terrain, qui resteront en vigueur pendant au moins deux à trois ans. Au mieux.

De hauts responsables de la sécurité refusent d’évoquer le pire des scénarios, celui d’une rencontre entre les capitaines d’armes qui n’aboutirait à aucun accord. Certains sont convaincus que la relation entre Netanyahu et Trump est meilleure et plus étroite que ne le laissent entendre les médias, et que Trump se soucie réellement de la sécurité de l’État d’Israël et de ses citoyens. C’est pourquoi, lors des consultations préparatoires au voyage de Netanyahu, ces mêmes responsables lui ont présenté les exigences minimales indispensables à la sécurité d’Israël dans les années à venir, et qui permettront de préserver les acquis de la guerre sur tous les fronts. Dans ce contexte, Jérusalem a également tenu compte du fait notoire que le président américain a une capacité d’attention limitée et peu de patience pour les détails, surtout lorsqu’il s’agit de plusieurs fronts, différents les uns des autres, où les combats, bien qu’apaisés, pourraient encore reprendre. Par conséquent, ce sont des principes qui ont été formulés, plutôt que des exigences de sécurité détaillées.

Les revendications et les controverses
Il est probable que Netanyahu réaffirme au président et à ses conseillers que la priorité absolue d’Israël est de préserver et de consolider les acquis de la guerre du 7 octobre, afin d’améliorer sensiblement sa sécurité nationale. Pour ce faire, il est nécessaire de neutraliser la capacité du Hamas, du Hezbollah, de l’Iran et de leurs alliés à menacer le territoire israélien (lorsque, dans le cas de l’Iran, il s’agit d’une menace existentielle). Il est tout aussi important d’empêcher ces acteurs, ainsi que d’autres, comme Daech par exemple, de lancer une attaque surprise contre les frontières du pays et les localités limitrophes, comme ce fut le cas le 7 octobre.
Netanyahu insistera sur le fait qu’Israël souhaite fonder sa sécurité sur un nouveau concept, incluant la défense avancée et la prévention, en complément des principes traditionnels. Il demandera aux Américains de faire preuve de compréhension et de soutenir politiquement et militairement la mise en œuvre de ces principes dans tous les domaines.
La réaction de Trump est loin d’être certaine.
Netanyahu tentera également de modérer l’influence des pays proches de Trump que l’armée israélienne qualifie d’« axe des Frères musulmans ». Ces pays soutiennent le mouvement des Frères musulmans auquel appartient le Hamas. Il s’agit principalement de la Turquie et du Qatar, dont les dirigeants bénéficient d’un statut privilégié et d’une influence considérable à la Maison-Blanche, malgré la guerre des idées et la campagne politique qu’ils mènent, ouvertement et secrètement, contre l’État d’Israël. Un débat, voire une confrontation, entre Netanyahu et Trump est à prévoir sur cette question.
Le Premier ministre cherchera également à obtenir l’aide des États-Unis pour maintenir l’avantage qualitatif d’Israël, dans le cadre du prochain plan pluriannuel d’assistance sécuritaire actuellement négocié entre les deux pays, et notamment en imposant diverses restrictions à la fourniture de systèmes d’armement modernes à l’Arabie saoudite. Aucun désaccord majeur n’est attendu sur ce point, mais des divergences sont à prévoir concernant la volonté d’Israël d’associer l’Autorité palestinienne aux instances chargées d’administrer et de faire appliquer la loi dans la bande de Gaza.

La crainte : la confrontation avec Zelensky va reprendre à la Maison Blanche
Les instances de défense et le Conseil de sécurité nationale sont conscientes des contradictions et des conflits d’intérêts, mais aussi de la nécessité pour Netanyahu et l’État d’Israël d’éviter, autant que possible, une confrontation avec Trump et son administration. À Jérusalem, on se souvient de la confrontation honteuse à la Maison-Blanche entre le président américain et le président ukrainien Volodymyr Zelensky, et l’on craint un scénario où Trump se retournerait contre Netanyahu et accuserait Israël de favoritisme et de sabotage des intérêts américains.
Par ailleurs, la veille de l’arrivée de Netanyahu à Mar-a-Lago, Zelensky s’y rend pour une rencontre bien plus cruciale et tendue que celle qu’a eue Netanyahu avec Trump. Il ne nous reste qu’à espérer que ces discussions avec Zelensky n’aggraveront pas l’humeur déjà fragile du président de la superpuissance qui soutient les deux pays.

Les 5 principes
Par conséquent, lors de discussions internes, une liste de principes a été établie que l’appareil de défense considère comme essentiels à mettre en œuvre dans presque tous les domaines :
Le premier principe est le désarmement des armées terroristes, c’est-à-dire le retrait des armes et des moyens de guerre de leurs mains et leur destruction, ou du moins l’empêchement permanent de l’accès à ces derniers.
Le deuxième principe consiste en le démantèlement et la destruction des infrastructures militaires, tant en surface que souterraines, de manière à empêcher les organisations terroristes de reprendre les combats, de se régénérer ou de mener une attaque surprise contre la frontière israélienne et les localités limitrophes.
Le troisième principe vise à empêcher la reconstitution des capacités militaires des éléments terroristes, et
Le quatrième, à mettre en place des mécanismes internationaux efficaces pour garantir et faire respecter la mise en œuvre rigoureuse des accords de désarmement et de démilitarisation et prévenir toute régénération.
La cinquième exigence de principe est un feu vert des États-Unis pour agir de manière indépendante et sans coordination préalable dans tous les cas où Israël constate des violations des accords, lorsque le mécanisme international d’application ne fonctionne pas correctement ou, D.ieu nous en préserve, lorsqu’il devient nécessaire de contrecarrer une menace dangereuse et immédiate – d’une attaque terroriste imminente à une attaque surprise majeure (cette procédure existe aujourd’hui à Gaza, au Liban et en Syrie, et Tsahal souhaite qu’elle se poursuive).

La demande de retour de Ren Guili
En ce qui concerne la bande de Gaza, les exigences de Tsahal, et probablement celles du Shin Bet également, incluent, en premier lieu, le retour du combattant de Yasm, le sergent-major Ran Gueili , la dernière victime kidnappée à ne pas avoir été inhumée dans une tombe israélienne .
La seconde revendication concernant Gaza est le démantèlement des armes et des capacités militaires du Hamas qui menacent le territoire israélien. Il s’agit notamment des lance-roquettes RPG et de certains types de roquettes, des mortiers, des roquettes et des missiles balistiques de tous types, des missiles antichars, des drones et des drones lourds. Les services de sécurité savent pertinemment qu’il est impossible de récupérer toutes les armes légères présentes dans la bande de Gaza, mais Israël insiste sur le démantèlement des capacités lourdes qui menacent son territoire et permettent une attaque surprise à sa frontière sud.
Le désarmement de la bande de Gaza implique la démolition et la mise hors service complètes et permanentes des infrastructures souterraines, notamment les tunnels d’infiltration, les tunnels de combat, les postes de commandement et de contrôle, ainsi que les cachettes. La production d’armes et d’explosifs doit également être empêchée. Israël exige par ailleurs l’interdiction totale de tout entraînement militaire dans la bande de Gaza.
Sur le plan civil, la participation des membres du Hamas aux instances gouvernementales et policières, ainsi qu’à des postes à responsabilité au sein du futur gouvernement palestinien, est impérative.
Israël exige également un mécanisme international efficace pour empêcher le Hamas de se reconstituer militairement. Selon les plans, la Force internationale de stabilisation (FIS) est censée remplir ce rôle, mais il est clair, à ce stade, qu’à l’exception de la Turquie, les autres pays ne sont pas prêts à déployer des forces pour affronter le Hamas. Israël ne s’oppose pas au fonctionnement du mécanisme dans les zones qu’il contrôle à l’est de la Ligne jaune, ni même à l’examen du « Plan vert de Rafah » comme projet pilote pour les plans de reconstruction. Cependant, la capacité des Américains et des médiateurs à mettre en œuvre le désarmement et la démilitarisation dans la zone actuellement contrôlée par le Hamas dans l’ouest de la bande de Gaza est très limitée. Néanmoins, Trump pourrait exiger de Netanyahu que Tsahal poursuive son retrait à l’est et au nord de la Ligne jaune, même sans que les exigences de sécurité soient pleinement satisfaites.
À cet égard, les services de défense recommandent à Netanyahu de camper sur ses positions et de faire clairement comprendre à Trump que tant que le Hamas ne sera pas désarmé et que la bande de Gaza occidentale sous son contrôle ne sera pas démilitarisée, Tsahal ne procédera à aucun nouveau retrait. Le reste peut faire l’objet de compromis et de discussions.
« La ligne jaune est une ligne de démarcation sécuritaire et une base de lancement pour une attaque », a déclaré récemment le lieutenant-général Eyal Zamir, chef d’état-major, lors d’une visite à Gaza – et il le pensait vraiment.
Il est fort probable que cette déclaration reflète également la position que Netanyahu présentera à Mar-a-Lago, et il pourrait demander au président américain d’autoriser le désarmement et la démilitarisation complets de l’ouest de la bande de Gaza. Trump, qui reçoit des suggestions de représentants du Qatar, de Turquie et d’Arabie saoudite, ne se précipitera probablement pas pour accéder à cette demande. Il pourrait répondre, comme à son habitude, « On verra » – ou bien opposer un « non » catégorique.

Également au Liban : Désarmer le Hezbollah
Au Liban, Israël exige la démilitarisation du Sud-Liban, ainsi que le démantèlement des infrastructures militaires et aériennes du Hezbollah. L’objectif est de permettre aux habitants du Nord de reprendre une vie normale sans craindre une attaque surprise. Tsahal reconnaît que cet objectif a été plus ou moins atteint pour tout ce qui concerne les villages chiites situés au nord de la frontière israélienne. Cependant, le Hezbollah poursuit ses efforts pour s’implanter et se réimplanter militairement au nord et au sud du Litani, et l’armée de l’air israélienne continue de mener des attaques et des destructions.
Israël exige également le démantèlement de l’arsenal lourd et à longue portée du Hezbollah, incluant roquettes, missiles balistiques, missiles côtiers, drones et capacités navales offensives. Le Hezbollah, qui a de facto accepté temporairement la pression exercée par le Sud-Liban, refuse catégoriquement cette exigence. En conséquence, les services de sécurité exigent que le gouvernement libanais fasse clairement savoir au Hezbollah qu’il souhaite la paix avec Israël et qu’aucune organisation armée autre que l’armée libanaise n’a sa place sur son territoire.
Jérusalem exige également une rationalisation des opérations du mécanisme international de contrôle, dirigé par un général américain, afin qu’il puisse vérifier le démantèlement des infrastructures du Hezbollah sur le terrain. Israël réclame par ailleurs le maintien de sa pleine liberté d’action pour opérer de manière indépendante dans une zone où l’armée libanaise est totalement absente ou n’y est présente que de façade. C’est ce qui se produit actuellement avec l’aval des États-Unis, mais la pression s’accentue sur Donald Trump de la part de l’Arabie saoudite, du Qatar, de la Turquie et de la France pour qu’il mette fin aux activités israéliennes au Liban et retire les troupes de Tsahal des cinq postes d’infiltration.
Avec la fin cette semaine de l’ultimatum américain au Hezbollah, une nouvelle situation se dessine. Il est probable que Trump soit informé par Netanyahu qu’Israël envisage une escalade significative des combats afin de contraindre le gouvernement libanais à démanteler le Hezbollah, considérablement affaibli, et à démanteler ses infrastructures et son armée à travers le Liban. Tsahal souligne que des plans opérationnels sont déjà prévus en prévision d’une telle éventualité. Trump contrôle les options de financement pour la reconstruction dont le Liban, dévasté, a désespérément besoin ; son influence sur le gouvernement libanais et ses soutiens sur la scène internationale est donc déterminante. On ignore encore si le président sera convaincu par les arguments de Netanyahu et quelle sera la politique qu’il dictera désormais.

« Mauvais accord » avec l’Iran
Concernant l’Iran, Israël exige un accord international qui abolirait son programme nucléaire militaire, limiterait le développement et le déploiement de missiles et de drones, et empêcherait toute subversion régionale par des groupes interposés. Cet accord doit prévoir une supervision internationale rigoureuse et continue. Actuellement, l’Iran refuse tout accord de ce type. Les instances de défense et les services de renseignement reconnaissent que Trump souhaite éviter les conflits au Moyen-Orient. Son objectif stratégique principal est de mettre fin aux conflits dans notre région, afin que lui et ses alliés régionaux puissent se consacrer pleinement à leurs affaires.
C’est pourquoi les services de renseignement craignent un « mauvais accord » avec l’Iran, après que ce dernier se soit montré disposé à faire des concessions et à entamer des négociations avec les États-Unis. Par conséquent, les instances de défense recommandent à Netanyahu de poursuivre deux objectifs lors de la rencontre de Mar-a-Lago : premièrement, empêcher la signature d’un mauvais accord avec l’Iran, qui mettrait Israël en danger à long terme ; deuxièmement, si aucun « bon accord » n’est conclu, garantissant la sécurité de la région et d’Israël, Netanyahu discutera avec le président des solutions à adopter face à l’Iran.

Il ne fait guère de doute que la question turque sera également abordée à Mar-a-Lago. En Israël, un consensus se dégage contre une présence militaire turque à Gaza, ainsi que dans le centre et le sud de la Syrie, pour de nombreuses raisons valables. Une telle présence limiterait la marge de manœuvre d’Israël pour contrer les menaces et opérer à distance. Alors qu’Erdogan propage quotidiennement une hostilité ouverte et incite à la violence contre Israël, le qualifiant de dernier djihadiste, la moindre étincelle pourrait dégénérer en un vaste brasier. Dans ce contexte, Netanyahu pourrait se heurter à des pressions de la part de Trump, qui tentera de faire pression sur Israël pour que la Turquie participe à la force de stabilisation à Gaza. Cette pression s’explique non seulement par la sympathie du président américain pour Erdogan, mais aussi par le fait que quasiment aucun autre pays n’est disposé à envoyer des soldats à cette force censée intervenir dans la bande de Gaza. Ce sera sans doute l’un des sujets les plus sensibles et explosifs de la réunion.
Les concessions susceptibles de mécontenter la « base »

Concernant la Syrie, Israël souhaite maintenir son déploiement actuel dans le sud du pays jusqu’à ce que la véritable nature du nouveau régime de Damas soit révélée. La principale préoccupation réside dans les attaques surprises perpétrées par des éléments djihadistes à la frontière du Golan. À cette fin, Tsahal maintient une présence militaire sur plusieurs postes avancés dans la zone tampon, notamment dans la région de l’Hermon. L’état-major israélien souhaite que les États-Unis ne fassent pas pression sur Israël pour qu’il renonce à ses exigences sécuritaires en Syrie, tant que la situation n’est pas stabilisée et que la charia n’a pas démontré qu’elle contrôle même ses propres partisans.
Dans le domaine maritime, les Houthis continuent de menacer la liberté de navigation et Israël. Les autorités de défense recommandent une étroite coordination avec les États-Unis pour continuer à faire face à cette menace.

En conclusion, les experts de la défense estiment qu’au sommet de Mar-a-Lago, Trump pourrait exiger de Netanyahu des concessions susceptibles de compromettre les acquis sécuritaires obtenus par Israël lors de la guerre du 7 octobre. Sur le plan de la politique intérieure, de telles concessions en période électorale risqueraient de mécontenter l’électorat de base et de faire le jeu de l’opposition. Par conséquent, il est probable que Netanyahu défendra chaque point avec acharnement. Ce ne sera pas une partie de plaisir pour lui.

Albert Fratty
Actualités Israël
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