Zehava, née lorsque sa famille quittait en secret à pied l’Ethiopie, aujourd’hui Lieutenant de Tsahal

C’est l’histoire d’un miracle. Celle d’un peuple qui a traversé toutes les épreuves pour enfin trouver la terre promise. C’est l’histoire de la famille Elias qui a perdu deux enfants lors du périple vers Israël et qui a vu naitre Zehava Elias en chemin. Fille d’un des Qes (rabbin) les plus respectés de la communauté, Zehava a suivi les conseils de sa grande sœur décédée du cancer : “fais quelque chose d’important à l’armée”. Décorée à plusieurs reprises, le lieutenant Zehava Elias raconte aujourd’hui son histoire.

 Un livre de Thora à la main, ils sont partis à pied vers la terre d’Israël

A l’approche de la fin du service militaire, Tsahal offre à certains soldats une formation visant à faciliter leur retour à la vie civile. C’est là qu’intervient Zehava. “Ce n’est pas évident de revenir à la vie civile après avoir été trois ans à l’armée. Nous essayons d’aider les soldats à faire les meilleurs choix pour la suite de leur parcours”. Ces cours sont destinés aux combattants, aux soldats seuls et aux soldats issus des minorités. “Le problème c’est quand on a un soldat combattant, éthiopien et seul en Israël, on ne sait pas dans quelle cours le mettre”, dit-elle en rigolant.

Le parcours a pourtant été long entre le moment où Zehava a le jour et celui où elle a reçu le diplôme d’excellence de la branche des ressources humaines.

“Mon père était le Qes de la communauté en Ethiopie. Mes parents vivaient dans un village et vivaient d’ailleurs plutôt bien. Quand ils ont entendu parler pour la première fois de la possibilité de partir vivre en Israël en 1984, ils ont directement voulu faire partie du voyage”, raconte Zehava. “C’était un rêve pour eux”.

Ils ne font pourtant pas partie de ceux qui quittent l’Ethiopie cette année là. Seulement les oncles de Zehava, sont sélectionnés pour partir en terre promise. En 1989, un nouveau groupe de Juifs se forme pour partir au Soudan d’où des avions les emmèneront au pays d’Israël. “Mes parents avaient déjà huit enfants et ma mère était enceinte de moi. Ils ont décidé de tout laisser, leurs biens, leur maisons, leurs animaux pour rejoindre Jérusalem.”

Ils ont simplement pris un peu de nourriture, de l’argent et le livre de la Torah de mon père. Ils ont suivi un guide qui était déjà arrivé en Israël lors du premier voyage en 1984 et qui menait le groupe. Ils marchaient de nuit pour ne pas être repérés et dormaient le jour.”

De nombreuses personnes sont mortes en chemin et ce destin n’a malheureusement pas échappé à la famille Elias. “Un de mes frères était très malade. Mon père l’a emmené dans une petite ville au Soudan pour le faire soigner. Mes grands frères m’ont raconté qu’il était déjà mort dans les bras de mon père mais qu’il a insisté pour qu’on soigne son enfant. Il avait trois ans. Quelques temps plus tard, un autre frère, de 5 ans, est mort de déshydratation. Ils ont continué de marcher, ils n’avaient pas d’autre choix.

Voir le jour au Soudan, en chemin vers Israël

Ma mère arrivait à la fin de sa grossesse. Lors des derniers jours, mes frères portaient ma mère sur une civière car elle ne pouvait plus marcher”, raconte Zehava. “En traversant une rivière elle a perdu les eaux et je suis née, là-bas, au Soudan.” La naissance de Zehava est venue comme une bénédiction du ciel pour la famille Elias, un appel à la joie et à l’espoir, un encouragement pour aller au bout du voyage.

Ils n’étaient pourtant pas au bout de leur aventure. Par la suite, le père de Zehava et ses grands frères ont été arrêtés et emprisonnés au Soudan. Sa mère et le reste des enfants ont été obligés de continuer leur chemin. Ils arrivèrent sains et saufs au point de rencontre avant de prendre l’avion pour arriver en Israël, plus d’un an après avoir quitté leur village. “Les gens appelaient cet avion un grand oiseau”, raconte Zehava. La famille étant toujours séparée, l’arrivée en Israël ne fut pas aussi joyeuse que prévue. La première année ne fut pas toujours évidente : difficulté avec la langue, difficulté d’intégration mais avant tout difficulté de construire une nouvelle vie sans les hommes de la famille.

C’est seulement un an plus tard que ces derniers ont été libérés de la prison soudanaise pour rejoindre l’Etat juif. C’est une joie immense alors qui frappe la famille Elias, enfin réunie en Israël.

“Mes premiers souvenirs sont au centre d’intégration, tout le monde m’entourait et me gâtait. Ils me parlaient en amharique mais je répondais déjà en hébreu.”

La famille s’adapte doucement à la vie en Israël. En 1992, la mère de Zehava accouche de jumeaux, les premiers de la famille à être nés en Israël. Quelques années plus tard, elle rentre à l’école primaire où sont déjà plusieurs de ses frères et sœurs. C’est alors Edna, sa grande sœur, qui prend la famille en main. C’est elle qui prépare à manger et prend tout le monde à l’école. Parce que son hébreu est bien meilleur que celui de ses parents, c’est elle qui assiste aux réunions des parents pour ses frères et sœurs. Dès qu’ils en on l’âge, chacun des membres de la famille travaille en dehors des heures scolaires pour contribuer aux efforts de la famille.

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Mon père travaillait comme nettoyeur ou homme d’entretien de bâtiments. C’était dur mais il le faisait avec plaisir car il était en Israël. Nous travaillions dur aussi à l’école et on a d’ailleurs été acceptés dans une très bonne école où nous étions parmi les seules éthiopienne.”

Avec le temps, je me suis aussi posé de plus en plus de questions sur nos origines. Après avoir compris d’où nous venions et ce que nous avons enduré pour arriver jusqu’ici, je considérais toute action pour le pays Israël comme chose sainte.”

Protéger la terre promise en uniforme, donner la fierté d’être israélien

Elle voit ses frères et sœurs ainés servir dans l’armée et le service civil. Pour Zehava, le choix est clair : “l’importance et la fierté de porter l’uniforme pour défendre la terre promise était tellement grande”. En 2007, lors de sa dernière année scolaire, Tata, une de ses grandes sœurs et mère de sept enfants, annonce à la famille qu’elle a le cancer. Elle fut hospitalisée durant deux mois. “Le jour où je l’ai appris, il pleuvait, j’étais en route avec des amis pour le cours de psychométrique. Ma famille m’a appelé et j’ai crié, j’ai pleuré. Elle est décédée si vite. Ca a été très difficile pour mon père, c’est une des seule fois où je l’ai vu pleurer.”

A l’hôpital, elle m’avait demandé à moi de faire quelque chose de bien à l’armée, quelque chose d’important. Elle croyait en mes capacités.

Zehava termine malgré tout ses études avec de très bons résultats. En février 2008, elle s’engage à l’armée. Elle commence l’armée à Mihvé Alon par un cours pour les soldats d’origine éthiopienne : “J’ai senti que j’avais une maturité que les autres n’avaient pas. J’ai pris ce cours très au sérieux.” La suite est le parcours brillant que chaque soldate rêve d’avoir. Commandante de cours à Havat Hashomer, base militaire pour les jeunes en difficulté, avant de suivre le cours d’officier.

Elle reçoit le diplôme d’excellence parmi tous les soldats de la compagnie lors du cours.

“Je n’avais pas dit à ma famille que je faisais le cours d’officier. J’avais tellement envie de réussir, j’étais si proche de faire ce que Tata m’avait demandé. Quand mon père est venu à la cérémonie des diplômes, il était tellement fier. Moi même, j’étais en pleurs.”

Zehava devient en 2010 commandante des soldates instructrices dans la région du Commandement du Sud. Après une courte pause de l’armée, elle retourne au service en 2011 dans son poste actuel.

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En début d’année, elle reçoit le prix d’excellence de la Branche des Ressources Humaines pour son investissement dans son travail et à l’armée.

“Ma source de motivation c’est ma sœur. Je raconte souvent l’histoire de ma famille et de ma sœur Tata dans le cadre de l’armée. Je le fais pour donner la fierté d’être citoyen d’Israël. J’essaie de leur montrer que nous y sommes arrivés. Malgré toutes épreuves, je suis venu à l’armée et j’ai réussi à faire quelque chose de significatif. Alors, si moi je peux y arriver, tout le monde peut y arriver. Et ce changement s’opère petit à petit, d’abord au sein de ses proches, de sa propre communauté et ensuite aux autres.”


Zamtou (Zehava) vient du mot “traversée” en amharique, la traversée d’un ancien monde vers un nouveau monde comme elle l’a expliquée lors de la cérémonie. “Je veux également remercier la famille de Tsahal qui m’a permis de me faire grandir et contribuer”,  avant de rajouter, s’adressant à sa sœur Tata : “tout au long du chemin, tous mes succès sont dédiés à toi et à notre chère famille

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