Les 3 semaines qui séparent ces deux dates : 17 tamouz et 9 av sont une période triste et désignée en hébreu par l’expression בין המצרים  (beyn ‘hametzarim) que l’on pourrait traduire par : « entre les limites », cependant que se dégage de cette expression une idée d’étroitesse, voire d’angoisse, en dehors du fait que l’idée du pays d’Egypte se profile derrière ceci puisque מצרים  s’écrit exactement comme Egypte, pays où nous avons été réduits en esclavage, pays où l’on a exercé sur nous une pression extrême. Le mot מצרים  comporte en son centre, la racine צר  (tsar) étroit.

Des règles précises s’attachent à cette période que l’histoire a pourvu en évènements tragiques parfois uniquement pour le peuple juif mais, parfois, les évènements tragiques ont eu une portée universelle !

Nous savons que lorsque Moïse descendit du Mont Sinaï pourvu des Tables que D avait gravé par Lui-même, attristé (pour ne pas dire catastrophé) devant le spectacle du peuple débauché devant le veau d’or, brisa les premières tables de la Loi.

Lors du siège de Jérusalem, une première brèche fut ouverte dans les murailles entourant la ville tant au temps de Nabuchodonosor (-586) qu’au temps de Titus (70 après) 656 ans plus tard.

Devant le manque de bétail, les sacrifices au Temple furent suspendus.

Un sefer Torah fut brûlé à cette date. Une idole fut introduite dans l’enceinte du Temple.

Trois semaines plus tard, le 9 av, est une date à laquelle le peuple juif se désole car :

  • C’est un 9 av qu’eut lieu le rapport des explorateurs qui effraya le peuple dans le désert et qu’ils refusèrent de rentrer sur la terre que D offrait à Son peuple.
  • C’est un 9 av que le premier Temple fut détruit en -586 par Nabuchodonosor.
  • C’est encore un 9 av que, par Titus, fut détruit le deuxième Temple de Jérusalem en l’an 70.
    C’est en 120 que fut détruite Bétar par les Romains alors que Bar Kokhba tentait de sauver le pays des envahisseurs.
  • Bien plus tard, c’est aussi un 9 av que le soc d’une charrue laboura le lieu où s’était élevé le Temple.

Mais, le Rav Dessler (Mikhtav MéEliahou) énuméra encore bien d’autres catastrophes  telles que l’expulsion des Juifs d’Angleterre le 9 av 1290, l’Inquisition d’Espagne le 9 av 1492  puis il rappelle que les deux grandes guerres mondiales furent déclarées en cette même période : date funeste s’il en est……..

Dès lors, personne ne s’étonnera du fait que ces trois semaines soient considérées comme une période de deuil.

Cependant, selon les communautés, existent des usages différents : chez les Ashkenazes, ne seront célébrés ni bar mitsvoth ni fiançailles ni mariages ou autres évènements festifs comme pendaison de crémaillères (hanoukat bayit) et autres. Certains s’abstiennent même de consommer des fruits nouveaux et d’écouter de la musique comme bien entendu se couper les cheveux (y compris le « halaké »[1] évidemment), étrenner un vêtement neuf et même aller se baigner.

Chez les sefaradim, en Israël tout au moins, on célèbre bar mitsvoth, fiançailles et mariages jusqu’à la veille de Rosh hodesh Av.

Pendant les neuf jours allant du 1er au 9 av on peut relever des coutumes différentes (minhaguim).

Ainsi, chez les Ashkenazim, de même que l’on ne se coupe pas les cheveux, on ne se rase pas et on ne se parfume pas. De même, à la veille de Rosh Hodesh  av, on prépare des vêtements  pour pouvoir se changer pendant les neuf jours (on sort des vêtements propres et pas neufs dont on se vêt pendant quelques heures et que l’on va laisser de côté pour la semaine), on ne se baignera et ne se douchera pas, on ne fera pas de lessive, on ne fera pas le ménage et on ne consommera aucune nourriture carnée, sauf pour les repas du shabbat.

Si, pendant les neuf jours a lieu une brith mila (circoncision) on présentera à la séouda des plats lactés ou neutres et avec du poisson.

Pour le shabbat il est possible de consommer de la viande.

Chez les Sefaradim, il y a une disposition qui permet de se laver sauf pendant la semaine où « tombe le jeûne » (hashavoua shéhal bo) c’est-à-dire que si le jeûne tombe le mardi, la stricte observance de « deuil » de 9 beav aura lieu les dimanche, et lundi  jusqu’à lundi soir veille du jeûne. Ainsi, toutes les autres coutumes concernant la toilette, les vêtements et même la nourriture ne seront observées que peu de jours. A la sortie du Shabbat qui se poursuit par la semaine « où tombe le jeûne », les Sefaradim ont coutume soit de congeler les restants carnés avant la sortie du shabbat soit de jeter ces restants. Les originaires du Maroc ont parfois conservé  la coutume du « khli » – viande séchée et cuite très longtemps dans de la graisse et conservée ainsi.

Edoth ‘HaMizrah (Persans, Irakiens, Kurdes, Bné Menashé, Indous, Yéménites etc….)  consomment de la viande sans cesse même lorsqu’ils sont dans une semaine de deuil pour la perte d’un proche.

LE JEÛNE : A la veille du jeûne on se mettra à table et on consommera un plat unique puis, pour la séôuda mafséket (repas avant le jeûne), on consommera soit un œuf dur que l’on écalera soi-même, soit un plat de lentilles. Là encore, le min’hag a force de loi. Certains mangent œuf dur et lentilles.

Le lendemain matin, après l’office on n’aura le droit d’étudier ou de lire que les Lamentations et non pas lire des Tehilim ou étudier le Shoulhan Aroukh sauf s’il s’agit des lois concernant 9 beav. On n’a pas le droit de travailler ni de fumer.

Le soir, après le jeûne on ne consommera pas encore de viande car le Temple a brûlé jusqu’au 10 av à 14h.

Que l’an prochain, le 9 av soit transformé en jour de joie ! Amen !

Caroline Elisheva REBOUH

 

[1] «Le « halaké » est la première coupe de cheveux d’un garçonnet âgé de 3 ans. Cette cérémonie a généralement lieu dans un lieu « saint » comme la tombe de Rabbi Shimon Bar Yohay à Mérone. Au cours de cette coupe de cheveux, le garçonnet reçoit son premier « talith katane ». Et lors de cet évènement  est servie une collation.