Une enquête documentée du quotidien Haaretz montre, preuves à l’appui, que les touristes juifs se voient appliqués, lorsqu’ils voyagent en Israël, des tarifs très supérieurs à ce que paient les touristes chrétiens dans les principaux hôtels du pays.

L’investigation donne des exemples, mais il y a très longtemps que les spécialistes du tourisme connaissent ce différentiel de prix qui peut être très important selon les hôtels ou les chaînes.

Les hôteliers disposent ainsi de deux grilles de prix : l’une appelée génériquement « tarif groupes » et qui concerne les groupes juifs, et l’autre, « tarifs pèlerins », qui ne concerne pas que..les pèlerins mais tous les groupes non juifs.

Ainsi, Haaretz s’est procuré une grille des prix de la chaine Dan pour « 2012-2013″.
En période basse le dîner est proposé à 6 $ (soit 5 € environ) pour les pèlerins, quand il coûte 32 $ (près de 26 euros) pour les groupes juifs, soit plus de 4 fois le prix !

« Les hôtels discriminent les juifs », déclara Mark Feldman de l’agence Ziontours à Jérusalem.

Officiellement, il s’agit pour les hôteliers israéliens de concurrencer les hôtels de Jérusalem-est ou ceux en territoires de l’autorité palestinienne qui tentent d’attirer les groupes de pèlerins par des prix bas.

Selon d’autres opérateurs israéliens il s’agit d’attirer une clientèle pas très fortunée : ainsi Yaacov Fried, qui dirige Daat Travel considère « que c’est une bonne chose même si sa clientèle est juive à 80% » et ne bénéficie pas de ces tarifs réduits.

« Pour ces touristes, il s’agit du voyage d’une vie qu’ils ne referont probablement pas notamment pour les africains, chinois ou coréens », ajoute-t-il.
Selon lui, la clientèle juive fréquente plutôt les « hôtels 4 et 5 *, alors que les pèlerins descendent préférentiellement les 4* que la clientèle juive ne fréquente pas ». (sic!)

L’enquête d’Haaretz montre clairement que ces différences de prix ne valent pas qu’en basse saison mais également pendant les fêtes : ainsi un touriste juif passant une semaine en Israël à l’hôtel Dan de Jérusalem pendant Souccot, paierait 15 à 20 % plus cher la même chambre qu’un pèlerin.

Pour un couple, la différence sera ainsi de plusieurs centaines d’euros.
Ami Etgar, le directeur général de l’association des tour operators réceptifs israéliens préfère lui parler à Haaretz de « segmentation des marchés » plutôt que de discrimination, et « d’adaptation des prix aux capacités d’achats de ces marchés »…sous entendu : les juifs peuvent payer.

Le quotidien précise que le ministère du tourisme n’a pas répondu à ses demandes sur le sujet.

Le commentaire de l’agence de communication de la chaine Dan est un chef d’œuvre de langue de bois  » la chaine a toujours proposé différents « packages » attirants pour tous les groupes du monde entier ».
Bien sûr, l’hôtellerie est une affaire privée en Israël, et les prix sont fixés librement par l’offre et la demande.

Bien sûr, hôteliers et tour operators cherchent à attirer le marché prometteur – bien plus que le marché juif – des groupes non juifs et des pèlerins.

Pourtant, cette politique a des répercussions sur des considérations bien plus importantes que la question de l’économie de se secteur.
En France, bien qu’on annonce un tourisme juif florissant – on peut avoir des doutes sur les chiffres mirobolants annoncés lorsqu’on se rapporte au nombre de sièges proposés par les compagnies aériennes – des dizaines de milliers de familles ne partent plus en Israël, en raison de la cherté de la destination.

Question d’infrastructure également : difficile aujourd’hui pour une famille de 5 personnes de trouver un hôtel pouvant proposer une chambre; il n’y a pas d’autre choix que de payer un tarif adulte pour un enfant de 5 ans.

En 2000, près de 2000 jeunes de 15 à 18 ans des organisations de jeunesse juives françaises partaient dans des programmes de découverte d’Israël; ils seront probablement autour de 500 cette année, rien d’étonnant, il en coutera de 1500 à 2000 euros…et ce n’est pas parce que les organisateurs gagneront de l’argent sur ces programmes qu’ils maintiennent par conviction.

Bien entendu, la découverte et l’expérience d’Israël peut se faire à 15 comme à 40 ans.

Mais établir une relation solide avec Israël – qui repose sur autre chose qu’un sentiment diffus de solidarité ou une émotion qui disparaît comme elle apparaît – implique une vraie découverte du pays, et le plus tôt possible, en multipliant le type d’expériences et de voyages.
Si un non –juif affirmait que les juifs « avaient les moyens de payer », il serait immédiatement taxé – à juste titre – d’antisémitisme.
Il faut pouvoir se permettre d’affirmer cela – même s’agissant des juifs américains – en éliminant les classes moyennes, les familles nombreuses, les jeunes ou les personnes âgées, qui n’auraient ainsi pas le droit de découvrir Israël ou d’y revenir.

L’économie de marché ne connaît pas de limites..tant que cela fonctionne : l’industrie touristique israélienne a la mémoire courte elle qui, lors de chaque crise, a été soutenue par le tourisme juif, toutes origines et classes sociales confondues.

L’économie de marché ne connaît pas de limite en matière de tourisme et de découverte d’Israël, mais il serait temps de se pencher sur la question.

A défaut, on rencontrera encore des jeunes qui ne savent pas que, derrière les plages de Tel Aviv, sa cache un pays et il deviendra très compliqué de continuer à faire d’Israël un élément fédérateur de la totalité du peuple juif.

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