Et de mettre en cause sur ce terrain périlleux l’état déplorable de certains quartiers dits sensibles et le délabrement de nombreuses cités.
Quelle est alors la différence entre une explication et un débordement de langage ? Précisément l’usage de termes excessifs comme celui d’ « apartheid » que le premier Ministre a cru devoir employer à ce propos. Car en tous l’excès nuit à la cause que l’on prétend défendre.
Comment parler d’ « apartheid » à propos de la France! L’Apartheid a été un système propre à l’Afrique du sud raciale et raciste, celle qui avait inscrit dans son droit public et dans ses comportements quotidiens le principe même de la discrimination méthodique entre individus selon la couleur de leur peau et leur prétendue appartenance à une race, posant l’autre principe selon lequel la race blanche était d’une essence supérieure. Le tout ficelé de quelques commentaires bibliques ou prétendus tels remontant à l’histoire des fils de Noé et à la malédiction de H’am, le rejeton présumé négroïde.
Comment oser évoquer ce système odieux à propos de la France, celle du droit d’asile, de l’école publique, du regroupement familial et de la Couverture Maladie Universelle, et cela en dépit de la crise économique qui la sape depuis plus de quatre décennies à présent? Manuel Valls s’est-il laissé aller à cette identification malvenue par provocation, comme font ceux qui parlent de « mur de l’Apartheid » à propos du mur de sécurité qui tente de prévenir les attentats-suicides contre la population civile d’Israël? Serait-ce pour susciter ce qu’il imaginait être un choc de conscience?

Et si l’effet produit était exactement l’inverse? Si par cette erreur de vocable et de concept l’explication tournait tout de même à l’excuse, au risque de voir l’excuse tourner à l’absolution? Depuis que sous différents gouvernements, « la politique de la ville » a été lancée des sommes considérables lui ont été affectées, avec des résultats parfois probants mais trop souvent mitigés ou nuls. Pour qu’une politique d’intégration réussisse, il y faut de la volonté et du désir de part et d’autre. L’exemple du million de rapatriés d’Algérie au début des années 60 le démontre et le prouve, quel que soit le jugement porté sur leur déracinement. Le terrorisme ne peut se prévaloir d’aucune excuse.

Prendre la vie d’autrui par pur décret d’une volonté de puissance ivre d’elle même doit se combattre sans réserve, ni linguistique, ni mentale. On ne doutera pas des intentions réelles du premier Ministre sur cette seule erreur. Mais il faut anticiper l’impact dévastateur du mot « apartheid » sur des esprits qui n’ont vraiment pas besoin d’alibi supplémentaire pour justifier leurs irrémédiables passages à l’acte. Un autre mot celui de « responsabilité » est un des plus saillants du vocabulaire martelé à juste titre par le premier Ministre. Ce mot là, dans ses usages politiques actuels, ne doit alors souffrir aucune exception.

Raphaël Draï, Radio J, le 26 janvier 2015.

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