PARASHAT VAYEHI 5780 – Shabbat du 11-01-2020 /Allumage Ashdod 16 h 35– 17 h 36 

BOUCLER LA BOUCLE

Lorsqu’un verset commence par « vayehi » il est de notoriété qu’une mauvaise nouvelle s’annonce. En l’occurrence, il va être question de la disparition de Jacob.

De très nombreux exégètes se posent des questions sur la forme « littéraire » de cette sidra : pour quelle raison est-elle « setouma ». Pour comprendre de quoi il s’agit voici la définition d’une parasha « setouma » (bouchée/fermée) ou « petouha » (ouverte) : une péricope est « setouma » lorsque le texte ne va pas à la ligne et pour vayehi, c’est le cas.

Rashi s’interroge et pour lui il est clair que le texte traitant d’une part de la disparition du patriarche et d’autre part du début de l’esclavage[1], il ne pouvait s’agir que d’un texte « satoum ».

Pour d’autres commentateurs, il existe dans cette fin du premier livre, une parfaite allusion à Jacob qui voulait dévoiler la fin des temps à ses enfants[2] et une allusion avec l’époque messianique : Jacob étant le 3ème des Patriarches et le Messie devant se dévoiler au moment où le 3ème Temple descendra du ciel entièrement construit.

Le Zohar expose que le personnage de Jacob depuis sa naissance et jusqu’à sa mort, est une révélation pour le peuple d’Israël. Il fut l’être par l’intermédiaire duquel une partie du « plan » divin s’est réalisé et voici comment :

Lors de la Création du Monde, lorsqu’HaShem voulut créer l’homme, IL aurait pu créer Abraham au lieu d’Adam mais alors, il n’y aurait plus eu qui que ce soit pour racheter les fautes du premier être humain. De quelles fautes Adam et Eve se sont-ils rendus coupables en désobéissant ? En dehors de la désobéissance d’Eve et du fait de la « pollution » physique et morale apportée par le serpent, Adam a fait « entrer » la mort dans ce monde ce qui fait que 3 chefs d’accusation ont été appliqués à Adam : le guilouyarayoth (des actes sexuels non permis), la avodazara (l’idolâtrie) et la shefikhoutdamim (verser du sang ou mort).

Le Zohar toujours explique qu’il fallut 20 générations entre Adam et Abraham pour qu’Abraham puisse commencer à effectuer une épuration des 3 fautes capitales.

Lorsqu’Abraham fut sauvé de la fournaise, ce fut grâce aux différents mérites que Jacob, en son temps, acquerra en étudiant comme il le fit avant de recevoir la bénédiction de son père et après lorsqu’avant de s’enfuir vers Haran il étudia en yeshiva de Shem et Ever 14 ans durant.

Trois ans après la naissance de Joseph, Jacob commença à enseigner ce jeune-fils ce qu’il avait étudié en Yeshiva durant ces 14 années ce qui fait qu’à l’âge dce 17 ans, lorsque Joseph fut vendu par ses frères et fut exporté en terre étrangère, son âme avait été forgée pour résister à une atmosphère païenne et fortement « polluée ».

De même qu’il fallut attendre la naissance d’Abraham pour rattraper les fautes d’Adam et Eve, il fallut attendre les épousailles de Jacob pour vérifier que les fautes commises par les deux premiers êtres humains pour être certains que l’impureté n’existait plus car, en effet, Abraham en donnant naissance à Isaac expulsa une partie des impuretés avec la naissance d’Ishmaël,

Isaac, en donnant naissance à Jacob et Esaü, expulsa ce qui restait d’impuretés avec Esaü, mais……..

Jacob vit son lit purifié avec ses 12 enfants : les 12 tribus….

La péricope terminant le livre de la Genèse, comprend plusieurs éléments d’enseignements : tant pour les pérégrinations du peuple dans le désert et la disposition des douze tribus autour du Tabernacle ; en effet, Jacob indiqua à ses douze fils[3]de s’installer autour de son lit de mort et c’est cette position qui prévaudra autour du Tabernacle.

Auparavant, les hommes savaient qu’ils allaient mourir puis, ils éternuaient et leur âme s’échappait. Jacob demanda à l’Eternel de permettre à chacun d’avoir le temps de mettre ses affaires en ordre et de bénir ses enfants avant de mourir. C’est la raison pour laquelle lorsque quelqu’un éternue on lui souhaite selon les langages : en hébreu hayimtovim ou livriyouth (bonne vie ou bonne santé) en arabe trish (vis!) en yidishzayguezint (bonne santé)….

Lorsque les fils de Jacob prirent place autour du lit de leur père mourant ils s’écrièrent : « shemâisraël, HaShemElokénou, HaShemehad » cette profession de foi est adressée à Jacob/Israël, lequel répondit à haute voix « Baroukhshemkevodmalkhoutoléôlamvaêd » Que soit béni à jamais le nom de Son règne glorieux. Les Sages se questionnent à ce sujet pour quelles raisons Jacob a-t-il proclamé cette phrase à haute voix alors que Moshé Rabénou l’a dite, comme nous avons coutume de le faire, en murmurant ? La réponse est que seuls les anges proclament le règne de l’Eternel à voix haute et en battant des ailes…. En ce cas pourquoi Jacob l’a-t-il dite à voix haute ? C’est parce qu’en combattant contre l’Ange, il en est devenu un lui-même car on ne peut combattre que contre son pareil, il était donc devenu un ange et en tant que tel il pouvait se permettre de proclamer cette phrase à haute voix.

De Jacob, nous apprenons d’autres versets que la pratique juive a insérés dans nos prières quotidiennes : lorsque Jacob est passé en allant ver la rencontre avec Esaü il a vu le camp des Anges : »ויעקוב הלך לדרכו ויפגעו בו מלאכי אלקים : ויאמר יעקוב כאשר ראם מחנה אלקים זה ויקרא שם המקום ההוא מחניים » Jacob poursuivit son voyage quand il rencontra des anges sur sa route et il dit ceci est le camp du Seigneur et il appela ce lieu Mahanayim  ceci se dit vers la fin de la prière des voyages.

De même, lorsque le soir avant de se coucher le Juif lit sa lecture du shémâ avant de dormir il prononce à la fin de cette lecture les versets que Jacob inclut dans sa bénédiction à Ephraïm et Menashé :

הַמַּלְאָךְ הַגֹּאֵל אֹתִי מִכָּל-רָע, יְבָרֵךְ אֶת-הַנְּעָרִים, וְיִקָּרֵא בָהֶם שְׁמִי, וְשֵׁם אֲבֹתַי אַבְרָהָם וְיִצְחָק; וְיִדְגּוּ לָרֹב, בְּקֶרֶב הָאָרֶץ.

Que l’ange qui m’a délivré de tout mal, bénisse ces jeunes gens! Puissent-ils perpétuer mon nom et le nom de mes pères Abraham et Isaac! Puissent-ils multiplier à l’infini au milieu de la contrée.

Ainsi les mérites et les actes de Jacob jalonnent-ils nos prières et ses actes doivent nous inspirer : lorsque Jacob avec ses femmes et ses enfants s’enfuirent-ils  de chez Laban, et que ce dernier rechercha ses idoles, Jacob proféra une malédiction destinée à tranquilliser son beau-père : « que celui chez qui seront trouvées tes idoles meure »! Or, Jacob ignorait qui avait dérobé ces statues et Rachel mourut à la suite de cette malédiction.

Lorsque Jacob rencontra le roi d’Egypte il se plaignit avant de répondre à la question du souverain qui désirait connaître l’âge du patriarche qui s’exprima : « ma vie est courte et malheureuse » ce qui fut une sorte de plainte : alors que Joseph lui fut rendu ainsi que Dina malgré le viol…..

Ce qui enseigne que chaque être vit la vie qui lui a été donnée et cette vie n’est jamais entièrement mauvaise il ne convient donc pas de se plaindre mais de remercier le Créateur pour le bien comme pour ce qui nous semble être moins bien et ne jamais maudire ou faire de serments qui pourraient être fatals à nous ou à nos proches tel le serment prononcé par le neuvième juge d’Israël, Yftahle Guile’âdiqui fit le serment de tuer en honneur à D la première personne qui viendrait l’accueillir et ce fut sa fille………….

Caroline Elishéva REBOUH.

[1] La Tradition enseigne que l’esclavage ne fut pas insurmontable tant que les 12 fils de Jacob étaient encore en vie.

[2] Et ce lui fut refusé de même qu’HaShem révéla la fin des temps au prophète Daniel mais IL lui interdit de le révéler.

[3] Les tribus sont au nombre de douze mais, la tribu de Lévy ayant été sanctifiée par tout ce qui a trait au culte (Cohen et Lévy), les deux fils de Joseph donnèrent leurs noms aux tribus de Joseph et Lévy.