PARASHAT TEROUMAShabbat du 22-02-2020 -Horaires Ashdod 17 h 17–18 h16
OFFRIR DE TOUT SON CŒUR

Depuis le Shabbat Mishpatim qui vient de passer, nous compterons quatre lectures spéciales qui s’ajoutent à la sidra hebdomadaire : Shabbat shekalim (hier) dans lequel il est question de la mitsva du mahatsit hashekel (avant l’entrée d’Adar) et ce don du mahatsit hashekel (cette année équivaut à 22 sh soit environ 5 Euros 80 par personne que l’on offre soit à une synagogue soit à une yéshiva et ce en général jusqu’à Pourim. Le shabbat Terouma n’aura aucune parasha additive puis, le 7 mars sera Shabbat Zakhor où l’on évoquera Amalek de triste mémoire dont on doit effacer le souvenir, le 14 mars sera parashat Para (la vache rousse) et le 21 mars sera Shabbat HaHodesh annonçant le mois de Nissan.


Au cours des années précédentes nous nous sommes livrés à des analyses diverses sur le sens des offrandes demandées pour le Mishkane.

Sans doute serait-il judicieux de se poser certaines questions concernant le « schéma » du texte, lorsqu’on sait surtout que rien n’est inscrit dans la Torah sans qu’il n’y ait une raison majeure.

Quelques uns parmi les plus grands exégètes comptés dans le Judaïsme s’interrogent sur le fait que le détail des offrandes à recevoir pour le mishkane commence par les métaux précieux d’or et d’argent puis, l’inventaire se poursuit par valeur décroissante pour se terminer par des objets de très grande valeur telles que des pierres précieuses qui devront se retrouver enchâssées sur le pectoral porté par le Cohen Gadol….. Tous voient leur curiosité intellectuelle excitée car d’après la logique cette liste aurait pu être écrite selon un ordre décroissant ou croissant sans revenir ensuite sur les offrandes de grande valeur marchande.

Bien entendu, les raisons à cela vont être énumérées ci-dessous :

Le Ohr HaHayim1 et le Hida2 apportent des réponses assez voisines selon lesquelles les trois métaux cités en premier : or, argent et le cuivre symbolisent trois sortes d’offrandes : la première (l’or) étant vraiment une offrande sans aucune préméditation, une offrande pure et simple : netina en hébreu. La deuxième (l’argent) étant une offrande faite avec une arrière-pensée ainsi qu’on recommande donner de l’argent peut annuler un mauvais décret… Puis la troisième offrande de valeur moindre par rapport aux deux précédentes mais aussi de valeur morale plus discutable qui consiste à donner inconsidérément plutôt que d’autres le fassent à la place…..

A propos des dons de pierres précieuses faits par les « Nessi’im » il est d’abord une  parenthèse à ouvrir : Les Nessi’im ou présidents des 12 tribus ont fait l’objet d’un prodige : en effet, de toutes les offrandes énumérées, le matériau à offrir était à la disposition de chacun : ils avaient tous emporté avec eux de l’or, de l’argent, du cuivre, de la laine et du bétail, mais pas de pierres précieuses : comment allaient-ils pouvoir trouver ce qui leur était demandé ? Le Midrash enseigne que les « ‘annaney hakavod » (la nuée) avaient laissé à la porte de chacun des présidents une pierre précieuse correspondant à la tribu qu’ils représentaient, ainsi, leur devoir était-il d’apporter les pierres à enchâsser sur le pectoral. Cependant, les exégètes tentent de trouver des explications dans tous les domaines : pourquoi HaShem commence et termine l’énumération des « articles » à offrir par des choses hors de prix et termine-t-IL par des objets hors de prix ? Parce que, avancent-ils, pour le Saint béni soit-IL, peu importe ce que chacun donne, l’essentiel est qu’il l’offre de tout son cœur ! A ce propos, il est permis de s’interroger sur ces offrandes. Pourquoi cette demande d’offrande existe-t-elle puisque HaShem est Maître de l’Univers ? C’est parce qu’IL désire « mesurer » la bonne volonté de chacun d’entre nous : HaShem donne à chacun la possibilité de se rentabiliser et à partir de ce que l’homme va posséder et offrira sur ce dont il dispose, l’homme sera jaugé. Donc, toutes les offrandes auront la même valeur « aux yeux »  d’HaShem.

Les Nessiim ou Présidents, dans un geste élégant mais non dépourvu de suffisance et d’orgueil ils assurèrent que, pour leur part, si les quantités nécessaires n’étaient pas fournies eux, les Nessiim, complèteraient tout ce qui ferait défaut. C’est à cause de cette marque d’orgueil, que la lettre « youd » fut enlevée au mot « nassi » se prononce le Keli Yakar!

Rashi pour sa part, décompte le nombre d’objets à apporter en offrande et il écrit que « si l’on fait bien attention au décompte » on n’en a pas 15 mais 13 car dit-il, ainsi que Rabbi Yéhouda Mizrahi, peu importe qu’il s’agisse de laine bleue ou rouge il ne s’agit que de laine en fait et donc il n’y a pas 15 ingrédients mais 13 ! De toutes façons, rétorquent d’autres commentateurs, le fait que soient inventoriés ici l’huile et les aromates ne doit pas être pris en ligne de compte pour la simple raison que l’huile et les aromates n’ont pas pris part à la construction du mishkane mais ont servi APRES la construction du Tabernacle et ont servi quotidiennement après sa construction.

Quelles sont les autres raisons qui se greffent au chiffre 13 ou au 15 ? Le Midrash ajoute : parallèlement à cette demande d’offrande, HaShem a expliqué: pendant toute cette période d’avant-pendant-après la sortie d’Egypte, JE vous ai donné 13 offrandes que vous ME rendrez à présent !

Rabbénou Behayé pour sa part trace un parallèle entre les 13 articles demandés au début de la parashat terouma et le fait que tous les articles offerts en sacrifices sont au nombre de 13 également : 5 provenant du règne végétal (farine, semoule…) et 8 du règne animal 3= 13 !

Encore à propos du chiffre 13 : Rabbi Shim’on bar Yohaï précise qu’en réalité, les bené Israël n’ont pas construit un seul veau d’or mais bien 13 : un (de taille moyenne) par tribu, et un « central » et de plus grande taille ! Dans le chiffre 13 réside la nécessité de racheter cette faute par 13 articles…..

A propos des korbanoth (sacrifices), se pose la question : pourquoi HaShem demande-t-IL des sacrifices, puisque le monde Lui appartient IL peut prendre ce qui L’intéresse ! En fait, HaShem n’a pas besoin de ces sacrifices. Le Rambam dans le Guide des Egarés soutient que la demande de sacrifices vient car c’est ce à quoi était habitué le peuple qui avait vu se dérouler devant lui toutes sortes de sacrifices et leur esprit ne pouvait concevoir une autre dialectique.

Le Amoudey HaShiva présente une autre conception : au lieu de toucher physiquement un pêcheur, HaShem préfère un sacrifice…

Pour le Ari zal, 13 est l’expression des 13 midoth de Rahamim4 (Miséricorde) et il développe sa pensée en expliquant la présence du nom divin à deux reprises côte à côte ainsi : le premier Nom d’HaShem est inscrit pour faire en quelque sorte, un rempart avant que ne soit commise la faute originelle, un peu comme un bouclier et la présence du second Nom est faite pour « encadrer » en protégeant encore Adam après qu’ait été commise la faute originelle.

Le Midrash rapporte que lors de la Création du monde, les Anges s’élevèrent et développèrent leurs raisons de s’opposer à la création du monde et de l’homme, alors, narre le Midrash de manière très poétique, l’Eternel a revêtu Son manteau de Miséricorde et a créé l’homme pour qu’il soit protégé de lui-même.

Le Ramban indique que si le corps de l’homme est composé de la « poussière » récoltée des 4 coins du monde, la tête, elle, est originaire d’un seul point du globe terrestre : du Mont Moria et pas seulement du Mont Moria mais, plus précisément, du lieu même où eurent lieu les sacrifices offerts de tout leur cœur d’Adam, Noé et d’Isaac par Abraham !

Betsalel ben Ouri ben Hour5, fut désigné pour construire le Mishkan. Il était inspiré par HaShem et il construisit ce qu’il voyait en songe la nuit. Il était âgé de 13 ans.

Quant au chiffre 15, quelle est sa signification ? Pour notre péricope, ce sont l’huile et les aromates et le reste des articles devant être offerts qui font 15 articles. Ce chiffre correspond à l’addition des deux lettres youd et ‘hé présents dans le Tétragramme et formant un autre nom divin. Mais, il représente aussi la bénédiction du Ciel, car : lorsque les Cohanim étendent leurs mains pour bénir le peuple, dans chaque main il y a 14 phalanges et lorsque les Cohanim s’unissent pour bénir le peuple, ils prononcent la triple bénédiction pontificale se composant de 15 mots qui sont la Présence divine venant se poser sur chaque main d’où le nombre 15. Et, les deux mains unies font un total de 28 soit le mot koah = force.

Caroline Elishéva REBOUH.

1 Le Rav Hayim ben Moshé ibn Attar surnommé « Ohr HaHayim » HaKadosh d’après son œuvre maîtresse est né au Maroc dans la ville de Salé en 1696 et il décéda à Jérusalem en 1743 où il est enterré au Mont des Oliviers.

2 Rabbi Hayim Yossef David Azoulay né à Jérusalem en 1724 et décéda dans la ville de Livourne en Italie en 1806 (il est enseveli au cimetière de Guiv’at Shaoul à Jérusalem).

3 Les 8 sacrifices différents sont : ôla, hatat, asham, toda, shelamim, bekhor, ma’asser et pessah.

4 Les 13 « midoth harahamim » ou 13 dimensions de miséricorde sont énumérées dans les livres de prières et au long du rituel de Kippour comme ceci : « Vaya’âvor âl panav vayikra : Ado-nay (2)

kEl rahoum vehanoun, erekh hapaïm verav hessed veemeth….. »

5 Betsalel signifie : à l’ombre de D.