Magic book with a green tree and the rays of light on the background of nature. Symbol of knowledge.
Nous aimerions bénéficier d’une carte de lecture précise qui nous permette de nous orienter avec assurance dans notre vie et prendre les bonnes décisions. Nous tentons d’avancer au jour le jour le plus raisonnablement possible, mais voilà : sans cesse il se produit quelque chose qui semble imprimer une volonté soit contraire, soit favorable à ce que nous pensions nécessaire.

Comment être sûr de nos choix ?
Comment être certain d’être sur la bonne voie, comment tracer son chemin, demandais-je à mon Maître…
Duquel parlez-vous, me répondit-elle ? Le vrai chemin ou le faux ? Celui qui vous est réservé ou celui que vous désirez forcer ? Il n’est pas facile de déterminer ce que Cervantès appelait « le vouloir impénétrable des destins ». Cependant quand on a un peu de recul sur sa propre vie, on s’aperçoit qu’il existe des constantes qui impriment leur pression sur nos actes. La vie fait toujours des histoires, et dans ces histoires, nous agissons selon des scénarios formatés selon une grille dont le plus souvent nous n’avons pas idée.
Cette grille n’est pas d’ordre psychique ou psychanalytique. Elle est archétypale, c’est-à-dire qu’elle se construit selon une arcanisation qui façonne les événements selon une série de lois. Ce sont ces lois que la Connaissance a mis au jour.

Une des règles premières dont nous devons absolument être conscients, c’est que nous vivons dans un monde fondé sur la Parole. Pour un initié — pour nous tous — un événement se coagule toujours sur une donnée verbale. Quel que soit l’événement, l’initié cherchera la donnée qui a dirigé l’événement produit. Il part du principe que la vérité des choses s’inscrit dans le réel, où que ce soit. Ce qui existe est vrai. Un arbre qui pousse est vrai. Une maison qui tombe en ruine est vraie. Un virus qui nous assaille est vrai. En toute chose réelle, un message est proposé. Un « dire » s’exprime sous forme d’événement : à nous d’en découvrir le mot et le sens. Un initié — et nous sommes tous appelés à le devenir — cherche à savoir ce que la vie pense, il (elle) cherche donc à opérer une « Alliance » entre l’ordre des choses et le Verbe ayant initié la chose.
Dès lors l’initié, quand il est expérimenté, ou quand il est instruit directement par ce qu’Ibn’ Arabî appelait Khadir, perçoit l’inopiné à l’instant où il surgit. Dominique Aubier écrit : « L’analyse d’un événement est immédiate. L’initié n’a pas le temps de décrire ses mouvements de pensée, mais court à la conclusion. L’être de connaissance assume avec promptitude le jugement par sa conscience doctrinalement systématisée. » Il n’est pas du tout conditionné par la méthode scientifique qui procède de l’accumulation de preuves pour décider après coup qu’une chose fut vraie. L’initié est le fils de l’instant. Il voit la situation et en a l’intelligence immédiate. Et l’une de ses techniques, c’est que devant un fait vécu, pour lui, les noms et les mots actifs dans sa substance n’arrivent pas séparément. La concomitance est pour lui évidente, entre le mot et l’événement.
Le kabbaliste dira qu’il convoque la Bath-Col, c’est-à-dire la voix du Verbe, pour se faire dire la vérité. Il écoutera les mots tels qu’ils résonnent dans la langue du pays où il vit, dans toutes les langues qu’il connaît. Puis il se rendra sur l’hébreu, langue de sa Tradition, car cette langue a le don (mystérieux) de transmettre en direct le message. Les langues vernaculaires sont les vecteurs factoriels de l’énonciation accomplie, et le contenu de la Parole absolue ne sera clairement audible que dans la langue qui reporte au plus direct l’expression du Grand Dire lui-même : « Tout étant se manifeste, par l’énergie des Lettres divines scellées en lui » écrit Gershom Scholem. Assertion que je complète ainsi : « Tout étant se manifeste, se maintient et se transforme par l’énergie des Lettres divines scellées en lui ».

Comment le monde est-il fait et comment se maintient-il ?
Il est fait de « Faire », instruit par le Verbe ayant délégué son énergie, son système qui génèrent la structure. Le monde se maintient donc par la structure porteuse, par le système instructeur et par l’énergie informante. Pour l’initié, « le langage est l’être même du monde, comme il est l’être même de l’Homme » (Hayym Volozhyn).

L’initié est donc comme un tigre. Il surveille le Temps et n’a qu’un très léger retard sur le réel. Juste le temps de le voir. Je reprends ici ce que Dominique Aubier a écrit : « Le temps d’observer la manifestation vivante, aussitôt l’initié connaît l’esprit du moment. Il ne réfléchit pas aux procédures du sacré, elles font partie de son équipement intellectuel. » De même l’initié ne se contente pas de « méditer » : il est méditation incarnée, en ce sens que tout en agissant, son esprit est en état de réceptivité permanente. « Très vite, il discerne ce que la vie veut de lui, et aussitôt, il le veut aussi. » On appelle cela le principe de l’Alliance : les héros bibliques en ont soutenu la valeur et l’obligation. La volonté de l’initié — la vôtre si vous désirez acquérir ce degré de liberté — s’accroche à l’inventivité du réel, avec le minimum de retard : il « chevauche le tigre » comme disent les Taoïstes, le tigre étant l’animal emblématique de l’énergie bondissante.

« Les détails qui façonnent un événement dénoncent l’intrusion de la nouveauté et en sont les signes. Ces signaux sont toujours symboliques et pour deux raisons.
1. Le Cosmos est un « Qui fait ». C’est la thèse biblique. Mais également celle du Tao. Et celle des soufis. Et celle des Amérindiens… Tout en lui sera donc de l’ordre de la mise en œuvre concrète.
2. Le processus évolutif : c’est en Niveau 2 que surgit le traitement symbolique. La pénétration initiale de l’information (appelée guézer en hébreu de kabbaliste) en Niveau 1 est difficilement sensible. C’est un subtil murmure, un frémissement à peine perceptible. Mais quand l’information passe au niveau de son expression symbolique, elle devient visible, sous une forme représentée, imagée. C’est le lieu du symbole.
« C’est pourquoi les initiés surveillent les choses du réel quand elles surgissent en style d’événements anecdotiques, faisant la simplicité d’un événement, ils surveillent la force allusive d’un détail, d’une « co-incidence » survenues dans la substance du quotidien, jugée souvent inutile ou absurde.
L’information, passée inaperçue à l’instant de son intrusion, devient tangible une fois « coagulée » en événement vécu, même s’il est bref. La nouveauté devient sensible dès qu’elle s’épaissit dans un peu de matérialisation ».

L’initié guette l’apparition de ce Niveau 2, c’est-à-dire la couche III (sur VI) du feuilletage de l’unité en train de se constituer. Ces coordonnées systémiques positionnent le symbole à l’endroit précis du cycle en cours ; il en est la première esquisse. Sous cette forme, le projet en jeu peut être étudié, analysé, ramené à son intention. Le symbole une fois décrypté permettra de voir ce que l’avenir prépare pour réaliser le programme ainsi à demi-entrevu.
L’analyse s’effectue en première instance, sur le symbole. La prévision qui s’en extrait prédécrit ce que sera la seconde instance. En seconde instance, il y a toujours présence de la Gauche et de la Droite, donc possibilité de choix. A l’entrée de la seconde instance, bifurcation, là se situe le lieu du choix. Le lieu de la liberté. L’initié prend note des indications fournies en « Bip » — première instance — et fort de cette documentation, il attend que le Redoublement apporte en seconde instance la réalité sur laquelle faire jouer sa décision. Il ajuste son choix à la voie qui lui semble la plus heureuse pour lui, mais aussi pour la cause générale de la vie pour laquelle il œuvre.
Cette technique est détaillée dans le livre de Dominique Aubier, Don Quichotte la révélation messianique dont j’ai extrait les passages en italiques. C’est un enseignement précieux que l’on retrouve dans Le Pouvoir de la Rose.

Lire les signes est à la portée de tous.
Il faut cependant se garder d’un défaut qui s’insinue toujours au cours de l’apprentissage : le novice qui s’adonne à la lecture des signes ne manquera pas de noter ceux qui l’arrangent et lui sont agréables. La lecture des signes est illuminante : l’esprit s’éveille soudain à un monde qui parle en toute chose. Une sorte de vertige s’empare de l’élève, comme un enfant qui goutte pour la première fois au chocolat. Il s’en met plein le visage jusqu’aux oreilles. Une griserie qui peut prendre différentes formes : certains initiés en herbe sont pris d’une sorte d’éthylisme (momentané) qui les fait « décoller » d’euphorie, tant l’impact des signes peut être puissant surtout quand ils « parlent » à la personne et lui révèlent certaines choses sur elles-mêmes… Excellente alternative qui a permis à mon maître d’arracher plus d’un jeune tombé sous l’emprise des stupéfiants qui cherchaient à atteindre des « états de conscience augmentée » sous narcotiques. Elle en parle dans son livre Le Secret des secret. La Connaissance emmène l’esprit beaucoup plus loin que ces drogues minables qui anéantissent les cellules nerveuses là où la lecture des signes au contraire, stimule l’esprit par une pleine adhésion au merveilleux… du réel.
Le maître met bon ordre dans l’esprit de l’élève et le guide vers le meilleur de lui-même.
Certains « débutants », après la griserie que peut donner l’éveil initiatique, ressentent un sentiment de pouvoir personnel… qu’ils ne manquent pas d’essayer d’exercer sur autrui. Ce sont les petits gourous qu’il faut rabrouer au plus vite en les renvoyant aux travaux ménagers de base. D’autres encore reçoivent des signes… à l’envers.
En aucun cas, un signe de l’Invisible ne peut ordonner d’organiser un malheur. Il est impossible que la Vie ordonne de nier la Vie. L’Inversion est un archétype (voir La Face cachée du Cerveau) dont il faut avoir conscience. Nous pouvons recevoir un message à l’envers, mais dans ce cas, c’est l’esprit du récipiendaire qui priorise l’inversion. D’urgence redresser et remettre à l’endroit avant que la négation se cristallise et devienne plus difficile à retourner. Cela mériterait une étude à part.
C’est pourquoi la lecture des signes ne s’improvise pas. C’est une technique, un art.

Dois-je faire ceci ou cela ?
La technique du roi David consistait à « ouvrir la fenêtre ». Il sortait incognito dans les rues et cherchait à « voir » si « dehors » un événement même anodin ne lui communiquerait pas une information, aussi bien pour sa vie personnelle que la direction de l’Etat.
Lire dans l’immédiateté qui se donne à l’impromptu ce que la vie elle-même en pense. Ce qui se déroule là, en plan de cohérence temporelle, répond à ma question. Il se passe forcément quelque chose au moment où…
On a appelé cela la synchronicité. C’est un mot plat, en ce sens qu’il ne fait que constater le fait que le temps est synchrone entre deux événements. Mais il n’affirme aucunement l’existence d’un lien entre les deux. C’est juste une constatation, parfaitement neutre. En réalité, l’initié déduit que l’un parle pour l’autre, car les deux événements se déroulent sur la cohérence d’un plan d’unité. Raison pour laquelle j’évite l’expression synchronicité (car elle n’engage à rien) et j’ai adopté définitivement l’expression « plan de cohérence ». Sur la coupe du temps, à un instant donné, tous les éléments répondent de la même information en cohérence unitaire. Le signe venant du dehors répond de la question du dedans. Ibn’ Arabî, soufi andalou du XIIè siècle siècle, appelait cela « les signes de surface ». La surface du temps donne à voir le signe dans le réel qui s’expose là, dans l’immédiateté.

L’intuition est-elle valable ?
Certains font confiance à leur intuition pour diriger leur vie. Combien de fois ai-je entendu : « mon intuition ne m’a jamais trompé… » A quoi je répondrais : — oui, pour l’instant… Parce qu’en réalité, ce que l’on appelle intuition est un rappel de la conscience qui exerce sa pression sur l’esprit, précisément parce que notre esprit a vu des signes mais nous ne les avons pas intégrés. L’intuition est une formule de rattrapage dont l’esprit est doté quand nous avons « raté » les premiers signes et symboles. Quand je dis que « j’ai senti d’intuition que je devais faire ceci ou cela », c’est parce déjà de nombreux signes ont été vus et entendus mais notre esprit, préoccupé et diverti n’a pas su en lire le message et l’interpréter. Les signes précèdent de longtemps le phénomène intuitif, et l’initié lisant les signes n’attend pas d’avoir le sentiment ou le ressenti intuitif pour voir clair et décider.
De même l’intuition peut, elle aussi, subir le phénomène de l’inversion, et l’on peut « ressentir » très fort une pression nous poussant à tel acte alors que c’est précisément le contraire qu’il fallait faire. Inversion, quand tu nous tient !

Je parle de tout cela, en ayant fait l’expérience. Car je suis passé par certains stades dans la lecture des signes (sauf la drogue et le gouroutisme qui ne m’ont pas tenté).
Ma chance, ce fut de bénéficier de l’enseignement d’un maître exceptionnel sous le contrôle de qui j’ai pu renaître et évoluer. Un contrôle tout en gentillesse, parfois sévérité (justifiée). Au jour le jour, dans la vie au quotidien.
J’essaie maintenant de le partager au mieux… Non sans demander à chaque fois à l’Invisible si je dois persévérer dans cette démarche.

Tous les livres.
Pour la lecture des signes, je recommande le film « Après la Tempête« . Lecture des signes que la Nature nous envoie…
Dominique Blumenstihl-Roth