PARASHAT TETSAVE  5782–  Vendredi 11 février 2022–Yom Chichi 10 Adar 5782
Horaires Ashdod : entrée 17 h 04 – Sortie 18 h 03

UNE PORTION DE TORAH SANS MOSHE RABBENOU ?

Dans cette péricope, la Torah traite du Temple d’un point de vue fonctionnel et du point de vue des Cohanim. En effet, seront détaillées la façon qu’aura la menora d’éclairer et la façon de l’allumer, ainsi que la façon de balancer l’encens et, les différents vêtements des cohanim dont nous allons voir la description dans leurs moindres détails.

Cependant, plusieurs thèmes vont se dégager des versets de cette portion de Torah : la menora, avec sa lumière, sa signification symbolique, le rôle de Moïse dont le nom n’apparaîtra pas tout au long de ce texte, l’odeur qui va s’échapper du Temple grâce à l’encens (ketoreth) et surtout les rôles bien définis de Moïse et d’Aharon, la prise de fonction des Cohanim.

MENORAH : Dans le mot menora on décèle le mot ner bougie, flambeau comme dans le verset : כי נר מצוה ותורה אור  car la mitsva est une lumière et la Torah est un flambeau. La symbolique de la lumière est l’esprit sous tous ses aspects : c’est-à-dire, de la force de l’esprit et de la réflexion puisque la lumière de la Torah va se déverser à partir des  7 canaux du candélabre, sur le monde plongé dans l’obscurité. Ainsi, lors de la création du monde, D  a opéré une séparation entre les ténèbres et la lumière qui jaillit. « La lumière fut ». Le candélabre comporte trois branches doubles et une centrale vers laquelle toutes les flammes vont converger comme le peuple juif qui, peu importe où il se trouve se tournera toujours vers D le centre de ses prières et Jérusalem. Ces quatre branches (trois doubles et une simple) vont symboliser le quatrième jour où l’Eternel créa les astres et aussi les sept jours de la semaine la branche centrale et unique vers laquelle toute l’activité humaine va se tourner pour honorer le septième jour, le shabbat. Dans la menora nous pourrons déceler bien d’autres secrets et symboles.  La lumière étant ce qu’il y a de précieux dans la vie de l’homme car le monde sans lumière ne peut se développer puisque la lumière est nécessaire à tout.  L’exigence de l’utilisation d’huile d’olives est, d’après le midrash, une allusion : en effet, l’olive est l’un des fruits que D a donnée comme parure à Eretz Israël : la vigne (raisin), la figue, la grenade, la datte et l’olive. Pour donner de l’huile, l’olive doit être écrasée, foulée, sans ménagement aucun et malgré cela elle va produire un liquide excellent servant pour les luminaires et en particulier le luminaire du Temple sur la ménora mais encore pour la nourriture. Cette huile et l’olive peuvent être comparées au peuple juif, frappé, foulé, déshonoré, rabaissé, écrasé sur sa terre et partout ailleurs mais, qui éclairera les nations lorsque D le décidera.

Les commentateurs soulignent que dans Tetsaveh on évoque le mizbéah et l’encens alors que dans Terouma il a été question de tous les autres ustensiles qu’il faudrait dans le Temple mais ce n’est que dans Tetsaveh qu’il est question de ce mizbéah pour y faire fumer l’encens pourquoi ? Parce que devant ce que Moïse a fait, le Saint béni soit-IL demanda aux anges de faire un cadeau à Moïse et tous lui offrirent quelque chose et l’Ange de la mort lui offrit l’encens auquel est attribuée la faculté de repousser le péril de la mort comme cela a lieu dans le livre des Nombres où éclata une épidémie et lorsque l’encens fuma la mortalité s’arrêta.

Les vêtements du Cohen Gadol sont détaillés et notamment le méîl ou manteau qui comportait à sa base des clochettes ces petits ornements avaient une double utilité :  à avertir du déplacement du Cohen et, inversement lorsque le Cohen Gadol pénétrait dans le Saint des Saints, le jour de Kippour : si l’on n’entendait plus tinter les clochettes cela signifiait que le Cohen était peut-être mort par la faute des pêchés d’Israël et comme il était interdit à quiconque de pénétrer en ce lieu, on tirait le Cohen par une corde attachée à sa cheville.

Les commentateurs se posent aussi la question de savoir qui instruisit les cohanim à propos des sacrifices et de ce que le cohen devait faire en fonction quotidiennement. Le Talmud nous apporte la réponse en disant que Moïse endossa une tunique simple sans ourlet est-il précisé pour montrer aux cohanim ce qu’ils auraient à faire. Si le Talmud prend la peine de souligner que la tunique était sans ourlet qui se dit « imra » en araméen c’est pour y puiser une allusion. En effet, ce terme vient de la racine omer, dire, c’est pour nous rappeler que Moïse avait des difficultés d’élocution – à ce propos il y a plusieurs versions. Nous citerons ici la plus connue tirée du midrash rabba qui nous enseigne que les sorciers égyptiens avaient averti Pharaon de se méfier de Moïse qui représentait un danger pour la « couronne » égyptienne. Aussi, de manière à éprouver le jeune enfant qu’était Moïse à l’époque, on lui présenta deux plateaux l’un empli de pierres précieuses et un empli de braises incandescentes. Les sorciers préconisèrent de présenter ces deux plateaux à Moïse : s’il prenait des pierres précieuses il était donc un danger et s’il saisissait des braises il aurait prouvé qu’il n’était qu’un enfant. Le Midrash raconte que Moïse voulut se saisir de joyaux mais, un ange détourna sa main et lui fit saisir des braises qu’il porta à sa bouche et depuis lors, il bégayait.  Il avait donc la parole embarrassée.  Mais il y a aussi un autre commentaire qui nous enseigne qu’à l’instar de tous les bébés, Moïse apprit la Torah pendant qu’il séjournait dans le ventre maternel comme tous les foetus mais l’Ange de l’oubli qui frappe chaque bébé sur la lèvre supérieure pour lui faire oublier tout ce qu’il avait appris ne frappa pas ce nourrisson qui, par conséquent, lorsqu’il naquit était déjà un talmid hakham qui, par ailleurs, naquit circoncis. Le fait qu’il ait des difficultés d’élocution nous rapproche du fait que la tunique qu’il porta était sans ourlet : « sans parole » soit : sans « imra ».

Dans la section que nous avons lue la semaine passée : Terouma c’est le nom d’Aharon qui n’était pas prononcé et pour Tetsavé, c’est celui de Moshé qui n’est pas écrit dans cette parasha c’est, nous ferons remarquer le Ohr HaHayim et le Gaon de Vilna pour plusieurs raisons : en général, cette parasha de Tetsavé est lue dans la semaine du 7 adar réputée être à la fois la date d’anniversaire de naissance du plus grand des prophètes de l’histoire juive et, aussi, à 120 années d’intervalle, la date de décès de cet homme d’une stature historique et philosophique incommensurable.

Le fait que Aharon et Moshé ne soient pas nommément cités dans ces deux sidroth conforte ceci : le judaïsme est porteur de 3 « couronnes » : celle de la Kehouna (prêtrise et culte), celle de la Meloukha (Royauté) et, celle de la Torah. Or, Moïse a refusé la Prêtrise, il devint donc « propriétaire » des deux autres couronnes : la Royauté et la Torah en ce cas, il est impossible que ces deux hommes fassent ressortir les domaines qui leur sont confiés en même temps car, cela reviendrait, en quelque sorte à diminuer leur éclat.

Seul le nom de Moshé n’est pas cité mais il est clair qu’HaShem continue à s’adresser à lui ne serait-ce que dès le début où D S’exprime ainsi : VeAta Tetsavé Et toi, tu t’adresseras. Le pronom représente bien Moïse. Mais pour certains exégètes ce mot « tetsavé » possède une autre approche : ce mot  « tetsavé » provient du mot « tsévet » qui désigne une équipe ouun groupe de personnes unies dans une même fonction dans un but identique. Ainsi, un « tsav » un commandement serait un arrêté qui servirait à réunir des personnes autour d’une idée unique. En l’occurrence : autour des ordonnances de la Torah…

Ceci nous entraîne vers une question que se sont posé les Sages : pourquoi lorsque l’on parle des différents exils subispar le Peuple, les trois premiers ont des durées très déterminées tandis que le quatrième exil est d’une durée indéfinie ? La réponse est celle-ci : les trois premiers exils sont en regard des trois patriarches    lesquels n’avaient pas reçu la Torah comme ce fut le cas pour Moshé Rabbénou….. Le quatrième exil dont la durée est indéterminée parce qu’entre temps, le peuple a reçu la Torah et ce peuple qui a dit « naâssé venishma »n’a pas toujours à cœur d’étudier cette Torah qui remporte tant de sagesse.

L’huile d’olives qui va prêter son énergie pour éclairer est précieuse car elle provient d’un fruit dont la particularité est de pouvoir être succulente tel quel si on le laisse mûrir mais qui, si l’on désire qu’il donne meilleur de lui-même (son huile) devra être battu, foulé, écrasé, trituré, haché, tout comme le peuple juif qui se  doit d’être pourchassé, poursuivi jusqu’au dans ses moindres retranchements pour étudier sa Torah sans relâche et réaliser ainsi ce qui se trouve ainsi écrit : shémen – zayith – zakh – katith : une huile d’olives, pure, écrasée (ce que nous décrivons comme être de première pression).Le Ohr Ha Hayim fait le parallèle suivant : SHEMEN : c’est ce qui surnage tout comme le peuple juif dont la vocation est d’être les prêtres des nations. ZAYITH : c’est l’olive, l’un des fruits d’excellence dont a été parée Erets Israël, arbre qualifié d’arbre zayith ra’ânane car il est toujours vert, ZAKH : la pureté car le peuple se doit d’être PUR et intègre et, KATITH mot qui vient du verbe LIKETOSH : écrasé, trituré : un peuple qui, bien qu’il soit toujours poursuivi et persécuté se doit de rester fidèle à son D et à sa doctrine.

Un midrash illustre ceci de manière extraordinaire : il est écrit : NERI BEYADEKHA VENEREKHA BEYADI : Ma lumière est dans Ta main et Ta Lumière est dans Ma main. Cette métaphore signifie ceci la Torah est la lumière de D ainsi qu’il est écrit : KI NER MITSVA VETORAH OHR,  la lumière de la Torah est entre nos mains et notre âme juive est entre les mains de D.

Caroline Elishéva REBOUH