Loïc Le Gland, Conseiller des Français de l’Étranger pour la circonscription consulaire de San Francisco et conseiller AFE pour les États-Unis, en collaboration avec Julien Descamps, polytechnicien et étudiant en Master of Public Administration à Boston volent au secours des Français de l’étranger qui cherchent désespérément un rendez-vous auprès de leur Consulat afin de renouveler leur passeport. Ils viennent de  lancer RDV-consulat.fr une solution gratuite, simple, sans conservation de données, sans publicité commerciale ni récupération politique qui fonctionne dans quasiment tous les Consulats de France, aux quatre coins du monde.

Le Petit Journal USA est partie à la rencontre de Loïc Le Gland.

Loic Le Gland

Loïc Le Gland

Rachel Brunet, directrice du Petit Journal USA : Comment est né ce projet ?

Loïc Le Gland : En tant que Conseiller des Français de l’Étranger, j’ai souvent été interpellé par nos compatriotes qui essayaient désespérément d’obtenir un rendez-vous pour renouveler leur passeport. De nombreux homologues élus à travers le monde partagent ce même constat : un système stressant, aléatoire et injuste qui finit trop souvent par ce message « Tous les créneaux disponibles ont déjà été pris. Merci de réessayer ultérieurement. »

La frustration est quotidienne pour ceux qui peuvent se connecter régulièrement, et le système est injuste pour ceux qui n’ont pas un accès en continu à Internet.

De nombreuses solutions à long terme, telles que la dématérialisation, sont envisagées, mais on ne peut que regretter le manque de réponses aux problèmes actuels. Que faire pour que les Français ne soient plus obligés de se connecter tous les jours ?

J’avais évoqué plusieurs idées comme la possibilité de réserver des rendez-vous sur plusieurs mois, cela permettra au moins à un Français qui n’est pas dans l’urgence de patienter, quitte à établir un système de rappel des rendez-vous avec obligation de confirmation, un peu comme chez votre dentiste aux États-Unis. J’avais aussi souhaité l’option d’une liste d’attente des demandes qui ne peuvent obtenir de rendez-vous, cela aurait permis une évaluation plus précise du « backlog ».

Finalement, la seule possibilité a été de travailler sur un outil détaché des sites officiels : un service de notification de disponibilité des rendez-vous. C’était lors d’une réunion à laquelle j’avais encore évoqué ce problème que j’ai rencontré un étudiant français de Boston, Julien Descamps. Celui-ci avait ensuite voulu en discuter plus en détail, définir la problématique et proposer un cahier des charges. Julien est Polytechnicien et étudiant en Master of Public Administration. Ce premier échange m’a rapidement convaincu qu’il avait toute la logique, la compétence, et la compassion nécessaires pour mener à bien ce projet.

Nous voulions une solution gratuite, simple, sans conservation de données, sans publicité commerciale ni récupération politique. Julien a créé l’intégralité de cette application et la gère consciencieusement.

Passeport Français

Julien Descamps

Est-ce que la solution fonctionne pour tous les Consulats du monde ?

Au lancement, les utilisateurs étaient invités à demander l’ajout de leur consulat si nécessaire. Les élus du monde ont été les premiers à être informés du site RDV-consulat.fr et l’ont largement partagé. Julien a passé des heures à ajouter un à un quasiment tous les consulats du monde. Certains ont des algorithmes différents des autres et Julien a dû souvent s’y adapter. Quelques rares consulats ne disposent pas de système de rendez-vous automatisé, nous ne pouvions donc pas les inclure.

Cet outil, n’est-il pas, quelque part, un aveu de faiblesse pour les Consulats ?

Certainement un aveu que les outils mis à disposition ne sont pas adaptés à la situation actuelle. Nos consulats n’ont jamais traité autant de passeports et ils sont eux aussi les premiers à ressentir la frustration de nos concitoyens. Pour ce qui est de l’Administration, je regrette qu’il n’y eût pas suffisamment de réflexions pour répondre aux difficultés des rendez-vous. Comment accepter si longtemps que les Français doivent se connecter tous les jours pendant des semaines ?

Il ne s’agit pas d’un problème de moyens ni de budget : pour l’instant, l’application a coûté 60 Euros et du temps.

Nous avons été très surpris du succès de l’application, ce qui montre une véritable demande. En trois jours, plus de 70 Français de Dublin demandent à être notifiés par cette application quand un rendez-vous se libère. Ils sont plus de 250 à Madrid !

On se pose légitimement la question si notre administration a une évaluation du nombre de Français qui ne peuvent obtenir de rendez-vous.

Avez-vous été soutenus par le Gouvernement ou par le Consulat de San Francisco ?

Non, et c’est bien la raison pour laquelle nous nous sommes limités à une plateforme indépendante des sites officiels. Je dois cependant reconnaître qu’à San Francisco, les échanges avec les équipes consulaires sur place m’ont aidé dans ma réflexion. Je les remercie de leur partage de leurs points de vue. Pour ce qui est du Gouvernement, les tentatives pour discuter des solutions simples n’ont jamais été concluantes. Peut-être, nous fallait-il simplement nous imprégner de cette mentalité américaine et faire les choses de nous-mêmes ?

Comment les Consulats accueillent cette solution au service des Français de l’étranger ?

Le site RDV-consulat.fr s’explique de lui-même. Il est bien précisé qu’il ne s’agit que des rendez-vous pour les passeports et cartes d’identité, et qu’il n’y a aucune interaction avec le système officiel. L’application ne fait que vérifier si des rendez-vous sont disponibles. À ce jour, je n’ai reçu aucun retour officiel négatif, plutôt des encouragements à titre individuel. Pour ce qui est des Conseillers des Français de l’Étranger, j’ai eu largement affaire avec des réponses enthousiastes qui dépassaient les étiquettes politiques.

Quelques questions tout à fait légitimes ont été posées sur la sécurité ou les exigences de confidentialité. Nous répondons à tout le monde, de façon très transparente. Au cours de ses activités passées, Julien Descamps a acquis une expertise sur ces sujets.

Techniquement, comment fonctionne l’outil ?

La simplicité la plus extrême : pour être notifié de la disponibilité d’un rendez-vous, l’utilisateur doit :

– Choisir un Consulat,
– Communiquer une adresse e-mail,
– Accepter que nous conservions cette adresse e-mail jusqu’à ce que l’utilisateur se désinscrive.

Le programme ne demande pas de nom, d’adresse ou toute autre identification.

Un e-mail est envoyé dès qu’un rendez-vous consulaire est possible.

Éventuellement, une communication exceptionnelle peut être faite si un Consulat décide de faire des « sessions de passeports » sans rendez-vous.

Cette simplicité de façade cache la complexité du travail en amont.

À intervalles réguliers, un algorithme lit chaque plateforme consulaire de rendez-vous, celle-ci a une structure qui diffère parfois d’un Consulat à l’autre.

Julien travaille en ce moment sur plus d’automatisation et sur l’optimisation de ces séquences de recherche, en fréquence et en synchronisation, pour mieux s’aligner avec les rafraîchissements des plateformes de rendez-vous. Nous sommes très sensibles aux messages de nombreux utilisateurs et j’invite les utilisateurs à soutenir le travail de Julien.

En ce qui me concerne, je souhaite communiquer avec les élus locaux pour développer des idées en cas de situations de crise. Certains consulats avaient pris des initiatives efficaces, il faut qu’elles soient mieux partagées.

Je reste évidemment à disposition de l’administration pour brainstormer sur d’autres outils utiles.

Pour découvrir le site RDV-consulat.fr

www.lepetitjournal.com