Elie Elalouf a été élu député. Enfin un vrai francophone à la Knesset. Combien de fois a t-on vu des députés qui par opportunisme se déclarent “représentant des francophones d’Israël” alors qu’ils ne parlent que très difficilement le Français et … ne connaissent pas vraiment grand chose des difficultés des juifs de France qui débarquent en Israël. L’affaire de la reconnaissance des dipômes est révélatrice, beaucoup de blabla mais bien peu de réalisations.

Elie Elalouf est, depuis les dernières élections, élu Député de Koulanou. La presse israélienne parle de lui comme prochain “Ministre Social” dans le Gouvernement de Netanyahou.

Tel Avivre : « Elie Elalouf , vous êtes connu des israéliens et des français pour avoir reçu le prestigieux Prix d’Israël mais surtout pour votre action au sein de la Fondation Rachi. Qu’est ce qui motive aujourd’hui votre entrée dans le monde de la politique israélienne.

Elie Elalouf : C’est pour moi la continuité de mes activités et de mon parcours qui a commencé au Maroc puis en Israël où je vis depuis maintenant presque 50 ans. J’ai toujours oeuvré dans le social, que se soit en tant que bénévole ou professionnel et j’ai eu la chance de le faire tant, dans le cadre de l’État que celui de l’agence juive et comme vous l’avez évoqué dans le cadre de la Fondation Rachi que j’ai dirigé ces 18 dernières années. Cette nouvelle étape est pour moi l’opportunité de continuer de servir les causes sociales mais à l’échelle nationale.

C’est aussi un aboutissement parce que j’ai présidé la commission qui a élaboré le rapport sur la pauvreté en Israël commandité par le ministre des affaires sociales. Dans ce rapport nous avons analysé, fait des constats sur la pauvreté en Israël et surtout élaboré près d’une cinquantaine de préconisations pour que la pauvreté ne soit pas une fatalité, pour que la paupérisation de la classe moyenne ne soit pas irrévocable. Pour moi qui ait toujours été sur le terrain, cette étape est la possibilité de transformer ce travail de recherche et d’analyse en action.

Pour vous, Elie quels sont les trois grands défis auxquels devra faire face Israël dans les 4 prochaines années, soit pendant la durée du mandat du prochain gouvernement ?

Elie Elalouf : Israël doit se mesurer en permanence, avoir ce qu on appelle en hébreu trois “étendards”. Sa sécurité, son économie et sa société. Ces 3 domaines doivent en permanence être la préoccupation de l’État d’Israël. Les trois sont inter-dépendants, La sécurité est une évidence mais sans une économie forte, nous ne pourrons pas financer et développer les moyens indispensables à notre défense, donc au maintien de notre sécurité. Et cela ne peut se réaliser que si la société est suffisamment forte pour subvenir et soutenir les deux domaines précédents.

Or la société israélienne a des faiblesses qu’on ne peut, aujourd’hui, plus continuer à négliger. Le fait que près d’un quart de la population vit en dessous du seuil de pauvreté ou quasiment ne peut pas permettre à Israël d’être un pays fort à terme, ni économiquement, ni militairement.

Le drame aujourd’hui en Israël est qu’on admet que la pauvreté n’est pas une situation temporaire, un moment difficile à passer mais qu’elle se transmet de génération en génération. C’est tout simplement inadmissible même du point de vue du judaïsme.

Question : On entend souvent dire que les populations touchées par la pauvreté sont les populations arabes israéliennes et ultra orthodoxes. Vous confirmez?

Elie Elalouf : Les faits sont là. La moitié des arabes vivants en Israël sont pauvres et la moitié des ultra religieux sont pauvres. Mais en proportion, ces populations représentent chacune 1/3 des victimes de la pauvreté, le dernier tiers représentant le citoyen israelien de base.

Si on veut une société différente, il faut moins d’enfants pauvres, moins de personnes âgées pauvres, plus de personnes qui travaillent dignement. Israël n’est pas seulement un Etat juif, c’est aussi un Etat démocratique, c’est à dire qu’il doit fournir à tous ses citoyens la même possibilité de s’épanouir.

Question : Si après les élections du 17 mars vous êtes dans la coalition quelles sont les grandes mesures que “koulanou” souhaite mettre en oeuvre pour relever ce défi social?

Elie Elalouf : Le rapport sur la pauvreté a été adopté par le parti Koulanou, c’est à dire qu’il s’agit, là, d’ un point d’accord incontournable avec toute coalition à laquelle nous participerons. Comme je viens de l’évoquer, ce rapport contient une cinquantaine de recommandations qui visent à réduire le coût de la vie qui est plus élevé que dans beaucoup de pays européens. Nous voulons casser les monopoles et ouvrir la concurrence par exemple sur les produits laitiers comme Khalon l’a fait pour la téléphonie. Mettre fin au protectionnisme qui n’a bénéficié qu’aux centrales d’achats. Concernant le logement, l’accession à la propriété est devenue quasiment impossible pour la classe moyenne sans un soutien familiale important. Les loyers ont atteints des sommets. Il faut s’attaquer au coût de base des logement et en premier lieu au prix des terrains. Aujourd’hui 93% des terrains appartiennent à l’État, ce n’est pas normal que l’État spécule dessus. Il est temps d’imposer des prix de location pour certains type de biens et certaines populations. Il ne s’agit pas pour autant de créer des HLM mais il faut insérer des logements à loyers réglementés à coté de logements à loyers libres. C’est ce qui existe en Suisse, alors pourquoi pas en Israël?

Question : Sur le plan diplomatique et notamment sur le conflit Israélo-Palestinien, quelles sont les lignes directrices de Koulanou

Elie Elalouf: Il existe un décalage de perception important de l’image d’Israël. En Israël, on a l’impression qu’on est un pays très fort, avec des dirigeants très forts mais quand on analyse la perception d’Israël à l’étranger, on s’aperçoit qu’elle est déplorable et que nous sommes très isolés. Cet isolement est le résultat de la ligne adoptée par notre premier ministre et de ses maladresses en terme tant diplomatique que de communication.

Concernant nos relations avec les palestiniens, elles ne sont pas au point mort, elles sont sur le point de devenir explosives. Pour une raison simple, il n’y a plus de discussions ou de négociations. Tout peut donc basculer du jour au lendemain et nous serons en situation dramatique où seule la force pourra etre employée avec tout ce que cela implique en terme de vies humaines, alors que la diplomatie était jusqu’à présent un des points importants de nos relations avec le monde arabe

Koulanou souhaite relancer les discussions et les pourparlers, Pour autant, nous refusons le partage de Jérusalem et celui des grandes agglomérations juives dans les implantations ainsi que le retour des réfugiés palestiniens. Ce sont nos lignes rouges.

Tel Avivre: Dernière question Elie, l’alya francophone, tout le monde en parle…Quelle sera, selon vous, son ampleur, faut-il mettre en place des mesures spécifiques?

Elie Elalouf : Je pense qu’en matière d’Alya, il faut faire sans en parler. Il faut arrêter de parler et de faire des effets d’annonces mais en revanche, il faut mettre en place des structures les plus discrètes possibles mais les plus efficaces possibles. Les plus belles alya en chiffres se sont préparées dans la discrétion, que se soit celle de l’ex URSS ou de l’Éthiopie.

Et en période où on peut mettre les juifs en danger par des déclarations, il vaut mieux s’abstenir d’en faire et se concentrer sur un travail discret de fond dans les pays où l’on pense qu’une Alya significative est à prévoir. Nous mettrons les structures d’accueil adéquates en Israël. Or pour le moment, je ne vois aucune mesure adéquate et concrète prise en Israël. En revanche j’entends beaucoup de déclarations et de maladresses faites par nos dirigeants à l’étranger.

Tel Avivre: Merci beaucoup Elie Elalouf »

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