PARASHAT SHOFTIM 5780 : Vendredi 21/08/2020 – Yom Chichi 01 Eloul 5780 horaires Ashdod entrée  18 h 58 – sortie 19 h 55

« Shoftim »… Gardons-nous, sans relâche tout simplement !…

JE SUIS BIEN AU-DESSUS DE CELA !

La péricope de cette semaine commence par le commandement de nommer des juges et des policiers dans chaque tribu, dans chaque agglomération, dans chaque ville, région…..

L’injonction est une fois de plus au singulier et non pas au pluriel.. La raison en est que cet ordre comporte plusieurs acceptions : toi l’individu au sein d’une société qui se doit d’être dorénavant structurée étant donné que le peuple va se retrouver sur sa terre et responsable de son peuple. La Torah comporte des lois concernant le sacerdoce et des lois religieuses mais, la Torah reçue au Sinaï est aussi un code civil, et un code pénal dans lequel sont détaillées toutes  les peines à appliquer pour un méfait, un dommage matériel ou physique et bien d’autres lois encore….

En conséquence, la société devant être structurée et les fonctionnaires désormais nommés devront exercer leur métier sans complaisance aucune, sans aucun parti pris.

Cependant, ces dispositions ne concernent pas seulement une collectivité mais aussi une personne qui devra se transformer en juge et en policier contre/envers lui-même. En effet, il est écrit : donne toi à tes portes et, le ShlahHaKadosh[1] de commenter : sur le visage sont situées 7 « portes » : 2 yeux, 2 oreilles, 2 narines et une bouche. Ces 7 « portes » doivent rester « pures » c’est dans cet objectif que nous devons nous comporter avec rigueur (comme des policiers) pour éviter de voir des choses « déplaisantes » ou de sentir des choses nauséabondes, d’entendre des choses pas convenables et ne pas prononcer de paroles blessantes, ou mensongères ou grossières. C’est pour cela que la Torah s’adresse à la deuxième personne : afin que chacun se surveille intensément pour être pur et savoir se taire car il est écrit : חיים ומוות ביד הלשון   c’est-à-dire que par la parole nous pouvons détruire ou construire, et ceci, pas seulement à propos de ceux qui nous entourent mais, à propos de nous-mêmes: par des propos imprudents nous pouvons nous mettre en danger ou nous placer dans des positions très dangereuses.

Dans cette sidra, nous relèverons 2 mitsvoth auxquelles les rois d’Israël doivent se soumettre : ne pas posséder trop de chevaux ni trop de femmes et d’argent (richesses).

Le Talmud regorge d’explications sur ces mitsvoth car, immanquablement, on pense à Shlomo HaMelekh, le plus sage de tous les rois, le plus poète de tous les rois, le plus puissant des rois de son époque, le souverain le plus adulé de toutes les femmes, mais surtout Salomon qui construisit le Temple, celui qui dans le Cantique à travers ses 8 chapitres a su célébrer, de manière allégorique, l’amour immodéré d’Israël pour son Roi et l’amour immense du Roi pour Sa bien-aimée (Israël), et n’a pas su se réfréner ni sur le nombre de ses compagnes ni sur le nombre de ses montures. Que s’est-il passé ? Salomon a enfreint la loi ???

La Guemara explique pourquoi cette interdiction d’accumuler un grand nombre de chevaux : à l’époque, pour acquérir des chevaux et de grande qualité de surcroît, il convenait de se rendre en Egypte or, HaShem avait, en quelque sorte, émis une sorte d’anathème sur l’Egypte : IL nous a libérés d’Egypte et nous ne devons pas y retourner…

Et pourquoi est-il déconseillé aux rois d’amasser femmes et argent ? Le trône royal se dit kisséכסאqui, en abréviation signifie kessef, souss, isha (argent, chevaux, femmes) כס »א….. pour pouvoir être un bon souverain, soumis aux lois divines il convient de prendre garde à ces trois domaines car, s’il est permis à un souverain d’avoir jusqu’à 18 femmes, encore faut-il que l’homme sache prendre des précautions surtout sur le plan des épouses or, Salomon s’est dit : « Quoi ? Moi qui ai érigé le Temple avant de construire un palais pour moi ? Moi qui ai élevé un chant jusqu’à D (cantique des cantiques) me laisserai-je détourné ? Moi qui suis réputé par ma sagesse me laisserai-je tenter par des cultes impurs, par des lieux impurs ???? Fadaises ! Je suis bien au-dessus de cela !!!

Le Keliyakar[2], met l’accent sur le mot « danger » (mettre en danger) ou saken, racine trilittérale en hébreu : samekh-kaf-noun(saken) qui est le sigle des trois mots : soussim (chevaux)- kessef (argent)- nashim (femmes). Les trois points dont le roi doit se garder de les multiplier.

Et pourtant, Shlomo possédait des écuries avec un nombre incalculable de montures. Sa première épouse fut Egyptienne et s’en suivirent d’innombrables femmes provenant de peuplades différentes et, toutes, implantèrent de nouveaux temples d’idoles diverses ; il amassa des richesses qui firent de lui, certes un roi admiré mais il s’éloigna d’HaShem, bien qu’il ait cru qu’il ne se laisserait ni distraire ni éloigner du culte ancestral, du culte dont il se fit le poète tout comme son père !!!

Dans le Talmud, (traité Nazir), la Guemara donne une nuance supplémentaire sur ce point de vue : c’est que, le nombre incalculable de chevaux attire la jalousie, le nombre impressionnant de femmes attire la convoitise et, un amoncellement de richesses force les honneurs et donc l’orgueil or, disent les Sages, ces trois choses extirpent l’homme du monde.

Pourquoi ne donne-t-on pas toujours de raison à l’appui des lois ? Il est dit par exemple : לא יקרא אדם לאור הנרdans la guemara Shabbat « on ne lira pas à la lumière d’une bougie » car, on pourrait être tenté de saisir la bougie ou la lumière pourrait s’éteindre  et on enfreindrait un ou plusieurs interdits. On pourrait être tenté de se dire non, mais je sais bien que c’est shabbat et donc je sais bien que cela est interdit ! Pourtant, la lecture pourrait être intéressante voire passionnante et je pourrais être enclin/e à prendre la lampe en main pour mieux lire et oublier un instant que c’est shabbat.

La morale de cette histoire étant qu’il ne faut pas être sûr de soi au-delà de ce qui est permis, car on pourrait arriver à contrevenir à des lois même basiques par excès d’orgueil, d’assurance ou par suffisance.

La sidra de shoftim est lue généralement  ou juste avant Rosh Hodesh Eloul ou juste après. Eloul est le mois de la repentance par excellence. Selon les communautés et les usages, on procède aux selihoth ou pas mais tout au moins, notre âme se prépare à la « rencontre » des jours redoutables.

Caroline Elishéva REBOUH.

 

[1] Rabbi Yisha’ya HaLévy Horowitz né à Prague en 1558 et décédé à Tibériade en 1630 auteur du ShnéLouhothHaBrith.

[2] Rabbi Shlomo Ephraïm de Lounshitz surnomme le KliYakar, 1540-1619 Né en Pologne vécut et exerça à Prague. Contemporain du Maharal.