De nos jours, parler de problèmes de couple c’est un peu comme parler de la pluie et du beau temps : c’est devenu d’une plate banalité. S’il ne fait aucun doute qu’un homme et une femme choisissent de devenir un couple pour être heureux, la réalité est tout autre. Disputes, incompréhension, mépris ou, pire, violence et infidélité viennent détruire en un clin d’œil des efforts parfois acharnés.

Reconnaître que son propre couple va mal est difficile. Et que dire si l’on a vécu des années de bonheur, ou si l’on évoque ces mots tendres échangés avec sincérité, qui résonnent encore dans la tête, et dont on souhaiterait que les murs de la maison puissent les entendre encore ? Mais c’est bien le passé qui les fait résonner, ces mots d’amour. Au présent, ce que les murs entendent ce sont les cris de la discorde, les mots du désespoir, proférés par deux êtres qui voient leur bonheur, parfois leur conjoint leur échapper, qui croient avoir raison et ne comprennent pas pourquoi l’autre ne leur donne justement pas raison.

Il arrive parfois que, resté seul après que le conjoint ait déserté la maison en claquant la porte, on y fasse les cent pas en cherchant on ne sait trop quoi, pour tomber enfin sur l’album de mariage. On le saisit et, même si l’on sait ce que l’on s’apprête à y trouver (un affreux mensonge, du moins ainsi le perçoit-on), on finit par l’ouvrir. Sans surprise, des visages souriants apparaissent. Deux visages surtout, que l’on peine à reconnaître même s’ils sont familiers et pour cause. Comme ces deux jeunes gens semble ravis… Quelle intensité, quelle complicité dans leurs regards ! Est-ce bien nous, sur ce papier glacé ? Nous étions tellement beaux en ce temps-là, non pas seulement parce que nous étions jeunes, mais parce que nous étions heureux. Le bonheur rend si beau.

Qu’avons-nous raté ?

Cette question lancinante est peut-être aussi la plus douloureuse qu’un couple au bord de la rupture est susceptible de se poser. Elle est douloureuse car le plus souvent, le couple mesure son incapacité à y répondre. Il y a quelque chose comme du désespoir, dans la prise de conscience d’un couple perdu dans un labyrinthe dont il ne voit pas l’issue.

D’un autre côté, tant que l’on est prêt à se remettre en question, tant que l’on cherche une solution, l’espoir reste permis. S’il existe une issue, et il en existe souvent une, on est en devoir de la chercher. S’il n’en existe pas, on est en devoir de se faire aider par quelqu’un qui nous montrera où et comment la chercher. Si à ce stade il n’en existe toujours pas, et qu’à l’aune de la vérité il n’en existe effectivement pas, ce sera toujours une certitude de gagnée. Après tout, le divorce peut être nécessaire pour aller de l’avant. Et s’il faut en passer par là, sachant ce qu’il en coûte, autant avoir la certitude de son côté.

Ainsi, qu’avons-nous raté ? Ce que nous avons raté, ce sont les bases. Tout édifice repose sur des bases. Et si l’on définit un édifice comme étant d’une part l’agencement de corps hétéroclites, d’autre part offrant une structure stable, et enfin dégageant une certaine noblesse dans l’apparence, le couple peut sans doute s’apparenter à un édifice. Un couple digne de ce nom marie[1] les opposés, dégage assurément une constance relationnelle, et puis… il est tout simplement beau à voir.

Or des bases, dans un couple, il y en a plusieurs. Celle que nous avons choisie d’évoquer dans le cadre de cet article procède d’une parole bien connue de D.ieu à l’adresse de ‘Hava : « Vers l’homme sera ton désir, et lui te dominera »[2].

Arrêtons-nous un instant. Les lecteurs qui nous font l’amitié de nous lire régulièrement savent que nous ne nous répugnons à tomber dans le vulgaire. Ils savent aussi et surtout que la Torah va loin, très loin au-delà des mots, plus encore au-delà d’une traduction[3]. Cependant, pour éviter tout malentendu, empressons-nous de dire ce que la traduction précitée… ne veut surtout pas dire !

En un mot, il n’y a ici aucun rabaissement de la femme, serait-ce par allusion[4]. À moins de vouloir en modifier le sens pour l’accorder à des fantasmes indignes de la grandeur humaine, on ne peut donc lire dans ces mots ni incitation, ni justification d’une domination de l’homme sur la femme. En somme, avons-nous envie de dire, le machisme est une sinistre farce, et le dindon en est l’homme plus que la femme, puisqu’en y souscrivant il se trompe lui-même en plus de tromper la femme.

Mais après tout, ceci tombe sous le sens. Nous parlons ici de la Torah, du Verbe divin, qui est tout de même bien autre chose qu’une pensée saugrenue juste bonne à alimenter la polémique, puisque de nos jours la démarche est à la mode. Le Verbe divin crée et construit, il souffle la vie. Aussi, que pourrait signifier cette injonction pour l’épouse à orienter son désir vers son mari, et quelle serait nature est cette domination, ou disons plutôt cette influence[5] que le mari devrait exercer sur la femme, le tout pour le bien du couple ?

Car tel est et restera l’enjeu : le couple. Un couple à la dérive a manqué les bases de son développement ? Ce verset vient justement à point nommé pour poser l’une d’entre elles. Derrière la sémantique des mots se cache une définition fiable, claire et vraie, de la nature masculine et de la nature féminine. On trouve même dans ces mots la mécanique qui accorde ces natures si différentes, conjugue harmonieusement les opposés sans les brimer, ni l’un, ni l’autre. L’homme et la femme dans leur merveilleuse complétude. L’amour, en un mot.

De quelle façon ? Nous le découvrirons la semaine prochaine dans la partie 2/2 de cet article.

David Benkoël
Analyste, je partage mon intérêt pour la construction de soi. J’aide par ailleurs des personnes en souffrance à se reconstruire.
david@torahcoach.fr

Notes

[1]  Littéralement !

[2]  Berechith 3,16.

[3]  Pour le dire autrement, les mots de la Torah véhiculent la Volonté divine sans la limiter par leur sémantique.

[4]  C’est exactement cela, tomber dans le vulgaire. La Torah évolue dans un tout autre registre…

[5]  Puisque le terme « domination » est aujourd’hui trop connoté.