PARASHAT DEVARIM 5781VENDREDI 16 juillet 2021 – Horaires Ashdod : Entrée 19 h 27  – Sortie : 20 h 29

LES RACINES DE LA HAINE

La première péricope du dernier livre du Pentateuque est Devarim et elle est toujours lue avant le 9 beAv. Ce shabbat devarim est d’ailleurs toujours désigné comme « shabbat Hazon » selon les premiers termes de la prophétie d’Isaïe, tout comme le shabbat après 9 beAv sera le Shabbat Nahamou qui est la haftara du prophète Isaïe encore qui commence par les mots « Nahamou nahamou Ami » (console toi mon peuple) et encore les six autres haftaroth suivantes dites de consolation.

Moïse en s’adressant au Peuple adresse des paroles de réprimande à ce peuple si exigeant bien que si avare en manifestation de reconnaissance  envers le Créateur. En effet, après avoir assisté au grand déploiement de prodiges et de miracles défiant toutes les lois de la nature et de l’Univers, ce peuple « à la nuque roide » (comme on nous a souvent étiquetés), n’a-t-il pas saisi la première occasion pour prétexter qu’HaShem en réalité hait ce peuple « pour le faire mourir dans le désert » ou encore pour le « faire mourir de faim » !!!  Sans crainte du ridicule !!! C’est un peu ce que l’on qualifierait de « pousser le bouchon un peu loin » !!! En effet, faut-il manquer de clairvoyance à ce point ?

HaShem leur distribue chaque jour pendant 40 ans de la manne sorte de galette qui prend le goût de ce dont on peut avoir envie au même instant ….. un puits qui déverse de l’eau claire et douce qui peut, elle aussi, prendre le goût de la boisson dont on peut avoir envie… Est-ce une marque de haine d’un dieu vis-à-vis de son peuple ????

Nous avons déjà évoqué lors de la parasha Mattot Mass’é à quel point la traversée du désert fut à tous points de vue, une suite ininterrompue de miracles sur le climat, les conditions de vie, de voyage où ils n’avaient à se soucier de rien, d’absolument rien.  Cette récrimination gratuite de la part d’une partie du peuple prétextant, pour retourner en Egypte, qu’HaShem hait Son peuple n’est-elle pas honteusement fausse? Cette haine n’est-elle pas, en sens contraire, l’expression d’une hantise d’avoir à affronter l’inconnu (entrée en possession du territoire offert par le Créateur) et donc, en conséquence, une sorte de haine pour le projet divin ?

De l’avis des  commentateurs, si Moïse harangue le peuple en  employant le terme  « eykha », c’est parce que, dorénavant, à la veille du jour où Moïse va devoir se séparer de ce peuple si rebelle, le valeureux homme adresse à ses proches des propos de tokhakha (réprimande). C’est sans doute la raison pour laquelle, selon certains rites, l’officiant psalmodie ce verset sur le ton des « Lamentations » de 9 beAv. Ce vocable fait son apparition dans le Pentateuque dès la Genèse où HaShem demande à Caïn où il se trouve après le meurtre d’Abel. Dans les Lamentations, eykha est traduit par hélas. Dans le discours de Moïse, ici, eykha révèle que conduire ce peuple rude et rebelle a été une tache très difficile pour Moïse et d’avoir perdu son flegme lui a coûté cette sentence de ne pas entrer dans ce pays où coulent le lait et le miel….

Rabbi Yona dans le Talmud donne un surnom à ce peuple jamais satisfait : il est « nirgan’  » c’est-à-dire que ce peuple est composé, en partie, de gens qui ne sont jamais contents, jamais satisfaits et trouvent toujours à redire, à déblatérer, toujours prêt à se trouver amoindri ou défavorisé par rapport à quelqu’un d’autre et toujours de manière injustifiée.

Ce peuple de « nirganim » trouvait toujours quelque chose qui n’était pas à leur goût au point de comparer leurs mérites à ceux de Moïse en avançant (midrashim) : « Moïse nous adresse des reproches mais lui, n’a rien d’inscrit à son actif !!! »

Le Kli Yakar remarque, après avoir revisité toute la littérature consacrée à la haine gratuite, que cette notion de « sine’ath hinam » (haine gratuite) dépasse, en gravité, et à elle seule, les 3 fautes qui ont provoqué l’exil provoqué par la destruction du Ier Temple : la ‘avoda zara (idolâtrie), le guilouy ‘arayoth (unions interdites), et la shfikhouth damim (verser le sang pour rien).

La raison en est très simple : verser le sang de son prochain, avoir des mœurs dissolues ou être voué à un culte étranger sont des actes qui sont visibles ou décelables tandis que haïr quelqu’un en son cœur ne peut être détecté ce qui fait que personne ne peut faire une remarque quelconque pour tenter de corriger son prochain et le faire ainsi revenir à de meilleures considérations.

Ainsi, continue le Kli Yakar, le Ier Temple, a-t-il été détruit par Babel (l’empire de Babylone à cause des 3 pêchés cités plus haut commis contre HaShem, alors que le deuxième Temple fut détruit par l’empire d’Edom (Rome) qui est l’emblème de la haine gratuite : celle d’Esaü contre Jacob.

De même qu’HaShem donne Canaan à Jacob, IL donne le Mont Séïr à Esaü, en récompense du fait qu’Esaü pratiquait le Kiboud Hourim (respect dû aux parents) de manière parfaite et inconditionnelle.

La parasha de Devarim reprend toute l’histoire – en quelque sorte – des territoires désignés comme possession d’Abraham et sa descendance dès la genèse de l’humanité. Ces terres que l’Eternel a désignées à Abraham depuis son départ de son pays natal appartenaient déjà à des peuples, des tribus. Cependant, HaShem, dès avant la création du monde, avait prévu toute l’histoire de cette région (et des autres régions du monde évidemment) : les Sages nous enseignent en effet que les exils ont été décrétés avant même que ne soit réellement créé le monde puisque les termes de Tohu et Bohu, ténèbres (hoshekh) et tehom (abime) sont cités dans le Pentateuque dès le deuxième verset de la Genèse puis l’ère messianique est citée en signalant qu’après ceci le souffle divin plane sur les eaux (verouah Elokim merahéfeth al pné hamayim) : Tohu représentant Babel, Bohou les Mèdes, Hoshekh pour les Grecs et Tehom pour Rome….

Et, la Torah insiste sur le fait que le Mont Séïr fut offert à Esaü en récompense du fait qu’il honorait son père plus que tout.

D’après le calendrier, il ne reste que 4 parashot avant d’entamer le mois des selihoth et de la volonté de chacun de s’amender ou de s’améliorer pour que l’effort au singulier, participe pleinement à la délivrance plurielle, à cette rédemption générale pour un mode de vie meilleur et gratifiant et plus harmonieux car l’effort d’une personne peut améliorer le sort de l’ensemble.

Caroline Elishéva REBOUH.

Pourquoi jeûne-t-on encore le 9 av malgré la création de l’Etat d’Israël ?
Le Rav Avraham Dray nous éclaire