PARASHAT SHEMINI 5782Vendredi 25 Mars 2022 – Vendredi 22 Adar II 5782 – Horaires allumage et sortie de chabbat Ashdod : entrée : 18:36 – sortie : 19:34

De Pourim à Pessah, nous disposons de tout juste un mois pour nous préparer à cette fête de la délivrance et de la fête du printemps pour laquelle nous bouleversons nos habitudes, nous opérons une opération nettoyage de grande envergure. Chaque année j’essaie de vous dire que, bien entendu, la maison est superbe bien astiquée, mais il est beaucoup plus important de rechercher le hamets qui est en nous….

LA FAUTE DE LA DUALITE

Moïse, pendant sept jours enseigna son frère Aaron et ses 4 fils les tâches incombant au Cohen Gadol et tous les autres travaux du Cohen tout au long de la semaine ainsi que tout ce qui devait être fait dans le Mishkan tout au long de l’année.

Puis, cette semaine d’entraînement écoulée, c’est avec entrain, ferveur, piété et avec un grand bonheur, qu’investis et parés de tous leurs atours que les Cohanim prirent leurs marques pour se montrer dignes de l’honneur qui leur fut fait de rendre Son culte à l’Eternel, Maître de l’Univers.

Nous savons d’ores et déjà que certains faits de l’histoire universelle et de l’histoire juive se reproduisent au long des millénaires puis des siècles car les hommes ne sont que des êtres de chair et de sang et sont toujours « piégés » par des fautes qui prennent parfois de très longues périodes avant de pouvoir être rachetées. Nous avons déjà évoqué cette question lors des différents commentaires précédents. Cependant, de très nombreux Sages se sont étonnés de certains points et ont posé les réponses de manière claire montrant de manière tout aussi claire combien nos actes se doivent d’être ordonnés pour ne pas avoir à pâtir de conséquences inévitables.

Ainsi, cette péricope de Shemini entraîne la pensée très loin : en effet, il est question donc de l’inauguration du Mishkan, le 1er Nissan.

De la plume de tous les exégètes ce jour fut le plus merveilleux pour HaShem depuis le 1er jour de la Création du Monde. Or, comment se fait-il qu’en ce jour la vie de Nadav et Avihou fut ravie ?

Les prestigieux exégètes tels que furent,  Rabbi Moshé HaDarshan[1],  le Kli Yakar[2], le Oznayim la Torah[3], le Méshekh Hokhma[4], mettent l’accent  sur la mort des deux fils d’Aharon.

En effet, lorsque le feu sacré enveloppa les deux jeunes Cohen, Moïse, s’exprima avec gravité envers son frère, Cohen Gadol, en lui faisant remarquer que les deux jeunes-gens étaient d’une dimension spirituelle à la leur : Moïse et Aharon, car, dit-il, leur mort témoigne de ce fait puisque la vie d’Aharon fut préservée bien qu’il y eut chez lui un manquement lorsque, dans l’espoir de gagner du temps pour que Moshé revienne, il demanda de l’or pensant que tout rentrerait dans l’ordre dans un court laps de temps. Or, cette faute d’Aharon fut partielle car il n’avait pas réellement l’intention de faire une idole.

Les exégètes cités plus haut expriment leur étonnement ainsi : pour quelle raison, ce jour grandiose que fut ce huitième jour ou jour de l’inauguration du Tabernacle dût-il être assombri par le deuil des enfants d’Aharon ? Toutes les réponses ramènent au camp du Mont Sinaï où Aharon demanda au peuple –  désirant fort une statue – d’aller chercher de l’or, pensant ici gagner suffisamment de temps afin que Moïse puisse revenir au camp et remettre les choses en ordre. Le zèle ou l’excès de zèle ne peuvent tout absoudre. Et faire plus qu’il n’est nécessaire n’est pas non plus pardonnable.

Cependant, Aharon ne put imaginer que les hommes reviendraient chargés d’or en un laps de temps si court. Il en résulta que la faute d’Aharon fut jugée partielle car, en effet, il s’exprima, par la parole, en demandant l’or mais l’intention de faire une idole ne l’effleura pas.

La faute en revint à Mikha qui, présent au moment où Moshé inscrivit sur une feuille d’or les mots « alé shor » taureau monte [5], lorsque Moîse voulut retrouver le sarcophage dans lequel étaient enfermés les ossements de Joseph le Tsadik, et cette « tasse » d’or fut récupérée par Mikha qui jeta dans la masse d’or fondu aux pieds d’Aharon et alors, surgit un veau d’or.

Lorsque, réapparaissant au Camp des Bené Israël, après avoir séjourné 40 jours et 40 nuits sur le Mont Sinaï, dans les nuées, Moïse vit le peuple s’adonnant à un spectacle affligeant d’hommes et de femmes ayant oublié en un instant ce qu’ils avaient entendu lors de la dédicace de la Loi : NE PAS AVOIR D’AUTRES DIEUX QU’HASHEM, il s’écria : « MI LEHASHEM ELAÏ » (que ceux qui sont pour HaShem me rejoignent) or, là, en cet instant, qui furent ceux qui rejoignirent Moïse ? Qui furent ceux, qui, motivés par un zèle inouï rejoignirent Moïse ? Seuls, les enfants de la tribu de Lévy, s’élevèrent contre ceux qui étaient en train d’entraîner les plus faibles vers la déchéance spirituelle. Cette faute du veau d’or est appelée aussi différemment HETE HASHNIYOUTH. Ce mot SHNIYOUT vient du mot SHENI (deuxième).

Quelle est donc cette signification ? Nous allons faire un saut en arrière, un saut de 2411 ans[6] !!! Lorsque le 1er jour de la Création fut terminé, nous lisons qu’HaShem a vu que c’était bien et « JOUR UN ». A ce sujet beaucoup de commentaires s’étalent dans les divers houmashim et, l’un d’entre eux attire notre attention : c’est que le deuxième jour de la Création furent créées les armées célestes avec les Anges et donc, aussitôt ont été créées les divergences d’opinion, si je puis m’exprimer ainsi, et ces êtres purent également donner leur avis… ce fut le deuxième jour. Car, il y eut autre chose que l’Unicité de D…..

Plusieurs jours plus tard, le sixième jour, lorsqu’apparurent sur la Terre les animaux et Adam et Hava (Eve), dès le moment où le serpent sut habilement faire naître en Adam et Hava le doute quant à HaShem et l’arbre de la connaissance, apparut alors le HETE HASHNIOUTH ou la faute de la dualité ou encore la grave faute de la pluralité dans la croyance. En effet, lorsque le serpent entreprit de détourner Adam et Eve et de les inciter à désobéir à D, il induisit en erreur le premier couple de l’univers en diffusant de fausses notions sur l’éternité et l’unicité de HaShem. Et, donc, il introduisit le doute en sous entendant qu’il n’y avait pas Unicité mais pluralité, en « polluant » Eve et en faisant apparaître la mort dans le monde terrestre.

Par l’œuvre d’élaboration du Mishkane, HaShem voulut ôter définitivement la notion de « sacralisation » du taureau en sacrifice et l’illustration de l’idole qu’ils voulurent construire.

C’est ainsi qu’apparut le « tahash » ou licorne avec une seule corne et pas deux comme le bœuf.

La dualité a apporté à l’humanité, la division/ le désaccord et le désordre. Le zèle dans toutes sortes de choses a apporté la violence. C’est ainsi que lorsque Shimon s’est  joint à Lévy pour venger l’honneur de leur sœur, le désordre et la violence sont apparu et, lorsque Shimon a révélé son manque d’adhésion aux Léviim, il s’en est suivi une réelle mise au point dans la façon de venger l’honneur d’HaShem : lorsqu’ après  l’épisode des filles de Moav venues semer l’impudicité chez les Bené Israël, c’est Pinhas (petit-fils d’Aharon, de la tribu de Lévy, donc), qui rétablit l’ordre  en embrochant Zimri ben Salou (de la tribu de Shimon)et Kozbi bat Tsour . Le zèle ne se remarque que dans la découverte des unions interdites (guilouy ârayoth) ou dans l’idolâtrie (âvoda zara). Cela se vérifie également lorsque l’épidémie se propagea parmi les Bené Israël, où la mortalité se remarqua dans la tribu de Shimôn car ils n’étaient pas animés du même zèle désintéressé que les Bené Lévy.

L’inauguration du Mishkane représentait, en conséquence, une sorte de rachat de la faute du veau d’or et du même coup la faute de la dualité fut éradiquée.

Caroline Elishéva REBOUH

[1] Talmid HaHakham du XIème siècle et originaire de Narbonne, descendant d’une famille de grands talmudistes]  famille Abun : Moshe ben Abun, le grand père, Jacob ben Abun, son père surnommé le Prophète[ lui-même, Moshé HaDarshan, ayant occupé le poste de Rosh Yéshiva du sud de la France. Tout comme Rashi, son contemporain il rédigea des commentaires utilisant souvent le Sarfatique, langue franco hébraïque utilisée par les Juifs de France de l’époque. Le Sarfatique  est à différencier du shouhadite langue provençale juive.

[2] Shlomo Ephraïm Lutschitz, 1550-1619, l’un des fondateurs du mouvement hassidique Habad (Loubavitch).

[3]  Zalman Sorotskine (1881-1966) né en Lithuanie et décédé à Jérusalem Rosh Yeshiva.

[4] Méïr Simha HaCohen    (1843-1926) auteur également du non moins célèbre « Ohr Sameah ».

[5] Taureau étant le symbole de Joseph

[6]  Ce sont 2411 ans qui se sont écoulés entre le 1er jour de la création jusqu’au jour où HaShem a donné Sa Torah au peuple juif.

©ashdodcafe.com